Faut il sauver les langues menacées

Faut-il sauver les langues menacées : occitan, corse, berbère… ?

Les langues locales viennent de faire l’objet d’un vif débat en France qui n’est que le rebondissement d’une discussion séculaire. Si notre constitution a précisé que « la langue de la république est le français », en 2021 a été votée la loi Molac relative à la protection patrimoniale des langues régionales. Mais cette loi a été ensuite partiellement censurée par le Conseil constitutionnel qui a condamné l’enseignement en immersion pour des raisons d’unité nationale.

Il s’agit de la face française d’un débat mondial, et l’objet de cet article est de rappeler les principales données pratiques de cette question.

Je vais procéder « à l’américaine » c’est-à-dire commencer par un exemple concret qui aidera la compréhension des réflexions générales que je ferai dans un deuxième temps. Cet exemple est celui d’une langue régionale française : l’occitan.

Une langue régionale française : l’occitan.

Données de base sur l’occitan

L’occitan est la principale langue régionale de France, du moins par la superficie concernée.

C’est une langue dérivée du latin, comme le français ou l’espagnol, ses voisins du Nord et du Sud. Elle est, ou était parlée, de Bordeaux aux Alpes (où elle mord un peu sur l’Italie), et du Massif central aux Pyrénées (où elle mord un peu sur l’Espagne). J’ai choisi la carte la plus simple, d’autres cartes subdivisant encore plus l’occitan en dialectes locaux :

cartographie de l'Occitan

Attention ! Il ne s’agit pas de territoires « occitanophones », mais de territoires où on en trouve au mieux des petits groupes. Et qui dit locuteur ne dit pas forcément pratiquant car il faut trouver un interlocuteur. Or c’est de plus en plus rarement le cas en famille, et encore moins avec à une personne en activité, donc trop jeune pour la parler encore.

L’enquête INSEE de 2011 évoque 600 000 locuteurs (donc pas forcément pratiquants) sur au moins 20 millions d’habitants, selon l’endroit où l’on place à frontière de la langue, soit 3 % de la population locale.
Les textes spécialisés évoquent l’absence d’enquêtes sociolinguistiques pouvant préciser ce nombre.

Du fait de l’âge des intéressés en 2011, la proportion est encore plus faible aujourd’hui même si , toujours en 2011, 61 000 élèves apprenaient plus ou moins d’occitan à l’école.

Mais quel occitan ?

S’agissant de la langue effectivement pratiquée, les variations sont considérables entre le gascon à l’ouest et les vallées italiennes à l’est. Et parmi ces variantes de l’occitan, il y a le provençal, qui, pour certains, est une langue à part entière.

La première idée qui vient à l’esprit est de vérifier s’il y a intercompréhension, c’est-à-dire si un villageois gascon peut échanger avec son homologue des Alpes italiennes. Malheureusement, il n’y a pas témoignage sur ce sujet, car l’occitan n’est effectivement parlé qu’entre seniors voisins.

Cela nous mène à l’occitan « officiel », celui qui est enseigné dans les écoles et qui a donné lieu à des manuels, et donc à une standardisation.

La question devient alors : les élèves formés à l’occitan dans ces écoles sont-ils compris par leurs grands-parents ? Oui bien sûr disent les partisans de l’apprentissage scolaire de cette langue.

Sans avoir fait d’études sur ce sujet (y en a-t-il d’ailleurs ?), quelques témoignages recueillis m’ont montré que ce n’était pas évident. Mais ce n’est pas un échantillon scientifique et j’en ignore la représentativité. En tout cas, pour le breton, pour lequel j’ai davantage de témoignages, les réactions sont très mitigées.

Bref la scolarisation a davantage pour résultat de « sauver » la langue que de l’utiliser en famille, même dans celles qui, exceptionnellement, ont un « senior » qui l’utilise encore.

Faut-il « sauver » l’occitan et comment ?

Il y a d’abord l’aspect historique et scientifique : de même que nous avons « sauvé » le latin et le grec ancien, ou que les Indiens ont « sauvé » le sanscrit, il y a le respect pour toutes les formes culturelles, ce qui implique une attitude ouverte et des mesures d’archivage. J’ai notamment vu passer des informations sur un archivage sonore des langues de France ayant pour objectif d’en faire un atlas. Je pense que ce point recueille l’accord général.

Il y a ensuite l’accueil et la considération des locuteurs actuels. À mon avis, c’est du ressort des autorités locales, car la proportion de personnes concernées est très variable d’un endroit à l’autre et peut par exemple être notable dans tel village. C’est au maire de décider s’il veut par exemple tel affichage bilingue, appuyer telle école ou association etc.

Il y a également la question de l’enseignement bilingue ou par immersion.

C’est évidemment une manière efficace d’apprendre la langue, en ne perdant pas de vue que ce sera la langue standard et non la langue parlée. Mais le jeu en vaut-il la chandelle ?

Les uns disent qu’il vaudrait mieux utiliser les heures de cours d’occitan au bénéfice d’une meilleure maîtrise du français, des mathématiques etc.

D’autres soutiennent qu’un apprentissage bilingue est excellent pour le cerveau, ce qui est probable, mais également valable pour le latin, l’anglais ou l’espagnol.

De toute façon, à mon avis, cela relève plus du domaine de la liberté individuelle ou d’association que de celui d’une législation nationale, via une officialisation partielle ou totale.

En effet, l’officialisation pose des problèmes de coût et de complexité dont nous parlerons plus bas.

Cette demande d’officialisation est néanmoins soulevée assez vigoureusement en Corse et moins nettement pour le breton, l’occitan, l’alsacien, le basque…

Vous remarquerez que je n’ai pas soulevé l’objection jacobine : « la république étant une et indivisible, toute différenciation, linguistique en l’occurrence, est une menace pour l’unité nationale ».

Cette objection en effet ne me paraît pas valable dans le cas de l’occitan : quelques centaines de milliers de seniors n’ont ni l’envie ni les moyens de se lancer dans une action séparatiste.

Bref il est bien tard pour sauver l’occitan, au-delà d’un simple archivage et de sa maîtrise par quelques militants ou érudits.

Nous passons maintenant à l’analyse mondiale de cette question, où l’on retrouve les mêmes questions pratiques que pour l’occitan en France.

Dans le monde, des langues de plus en plus revendiquées, mais en recul

Cette question des langues dominées se pose dans le monde entier, où la plupart des langues sont en voie d’affaiblissement ou de disparition. Le nombre de langues dans le monde est mal connu, il varie de 3000 à 7000 suivant les documents (ce dernier chiffre comprend des langues n’ayant plus qu’un seul locuteur) dont 90 % serait menacées : voir, entre autres cet atlas de l’UNESCO. (version française sur clic). Cela malgré un mouvement général de sens inverse pour leur réhabilitation.

Ainsi la nouvelle présidente de l’assemblée constituante du Chili a pris la parole en mapuche, langue « indigène » antérieure à l’arrivée de langue espagnole, tandis que les langues principales de l’empire inca sont devenues officielles au Pérou.

Une langue peut d’ailleurs être dominante ici (le français par rapport à l’occitan) et dominée ailleurs, comme le français en Amérique du Nord hors Québec, et même dans une certaine mesure à Montréal.

Elle peut aussi disparaître tout en restant respectée, comme le latin naguère, ou le français en Amérique latine et dans certains milieux nord-américains. Le souci est alors culturel et non utilitaire : l’objectif premier n’est pas de faire du tourisme à Paris, où d’ailleurs le français n’est plus indispensable, mais de se cultiver.

Langues locales ou minoritaires ?

Le cas du français mène à distinguer les langues locales des langues localement minoritaires.

Si dans beaucoup d’endroits d’Amérique du Nord le français langue maternelle ou langue seconde est une langue minoritaire et menacée, il bénéficie néanmoins de l’énorme appui de son « corpus » : sa littérature, sa bibliothèque scientifique, universitaire, scolaire, ses médias…

En France, cela amène à distinguer par exemple le basque et le catalan de l’occitan. Les premiers ont certes moins de locuteurs, mais bénéficient du « corpus » du basque et du catalan qui sont des langues officielles en Espagne ayant des millions de locuteurs. A l’inverse l’occitan, simple langue locale, ne peut s’appuyer que sur ses propres forces.

Le cas de l’alsacien, ou plutôt « des » alsaciens, est intermédiaire : s’il n’y avait pas eu les mauvais coups de l’histoire, il pourrait s’appuyer sur le corpus de l’allemand. J’avoue ignorer dans quelle mesure le breton est soutenu par un corpus irlandais, gallois ou écossais, langues celtiques voisines et soutenues par leurs administrations.

Vous remarquerez que je parle uniquement l’existence d’un corpus ou d’infrastructures d’appui, et non pas d’incitation au séparatisme, par exemple du Roussillon qui voudrait rejoindre la Catalogne ou du Pays basque qui voudrait rejoindre l’Espagne. Je pense en effet que ces questions, qui sont soulevées par certains, ne se posent pas en pratique.

L’officialisation : compliquée et pas forcément efficace

Le premier réflexe pour qu’une langue soit « sauvée » est de réclamer son officialisation. Mais ce n’est à mon avis qu’un élément parmi d’autres, et l’essentiel est ailleurs.

Je vous renvoie à mon article sur la langue corse pour apprécier les difficultés organisationnelles, humaines et donc budgétaires d’une officialisation.

Faut-il sauver la langue corse ?

Voici quelques exemples de langues minoritaires officialisées :

  • les langues celtes (gauloises) : en république d’Irlande, le gaélique est une langue officielle en principe à égalité avec l’anglais. En pratique si elle est effectivement enseignée dans le primaire et dans le secondaire, elle est quasiment abandonnée, sauf dans quelques « gaëltacht » regroupant quelques villages, où elle est la langue unique d’enseignement et de signalisation (je connais celle du comté de Galway, arpentée par un général de Gaulle y méditant après sa démission).

Je connais mal la situation de l’extrême nord gaëlophone de l’Écosse, mais bien noté que le gallois officialisé au pays de Galles est encore largement parlé dans certaines des régions de ce « pays ».

  • les langues berbères : ce sont les langues parlées par les premiers occupants du Maghreb avant les invasions arabes et qui sont toujours largement présentes dans certaines régions dont la plus connue est la Kabylie.

Ces langues ont longtemps été ostracisées : « tout berbérophone est un séparatiste » a-t-on longtemps entendu en Algérie, tandis qu’au Maroc arabophones et berbérophones s’opposent toujours aujourd’hui sur le « Dahir berbère » de l’administration coloniale française. Pour les premiers il s’agissait de « diviser pour régner » (ce qui n’est pas faux), pour les seconds c’était un acte positif de défense de la culture berbère.

J’en profite pour signaler le sauvetage de la culture kabyle, et de certaines cultures berbères marocaines par les « pères blancs » qui, à défaut de convertir les musulmans locaux ont transcrit, archivé et dans une certaine mesure sauvé les langues et cultures berbères.

La darija, enfant du triangle français – arabe – tamazigh (berbère)

Ces langues sont maintenant officielles en Algérie et au Maroc, mais il me semble que ça n’a changé grand-chose, malgré la proclamation de leur présence dans l’enseignement et l’ouverture de quelques chaires universitaires.

Il ne suffit en effet pas d’une déclaration gouvernementale pour créer et former les instituteurs dans une nouvelle langue et les nommer au bon endroit…

De plus, cette officialisation a caché un « coup de Jarnac » avec l’introduction d’un troisième alphabet « le tifinagh » aux côtés des alphabets arabes et latins. Voir la fin de mon article sur la Kabylie.

  • le français hors Québec au Canada : au Canada, le français et l’anglais sont officiels, en principe à égalité. Mais il faut voir de plus près ce que ça signifie : seules les administrations fédérales sont concernées, sans que le bilinguisme y soit toujours respecté.

Au niveau local, tout dépend du pouvoir provincial ou municipal. Même si, en principe, toute communauté francophone représentant 15 % de la population dispose de certains droits, en pratique ces vieilles communautés, qui existaient avant l’arrivée des anglophones, ont été noyées dans une immigration massive, européenne d’abord, et mondiale aujourd’hui.

Et les nouveaux responsables représentatifs, ukrainiens par exemple pour prendre une communauté particulièrement nombreuse, ne voient pas pourquoi on accorderait aux francophones des droits supérieurs aux leurs.

Bref l’officialisation n’est pas un remède miracle.

L’officialisation, une mesure très lourde.

En effet, tout ce qui met en branle la mécanique étatique sur le plan national est inévitablement source de coût et de contraintes : établissement de la réglementation, puis son contrôle, traduction, affichage bilingue, embauche de personnel bilingue soit en double soit en discriminant les monolingues.

Le tout appliqué sur de grandes étendues : le sud de la France pour l’occitan, une grande partie de la Bretagne pour le breton, l’Alsace, le Pays basque. Et presque toute la France si on prend en compte les autres langues régionales, bien qu’elles soient maintenant très peu parlées. Et les exemples ci-dessus nous ont montré que ce n’était en général pas efficace.

Bref, dans le cas des langues locales françaises, mieux vaut réserver cette question aux quelques municipalités concernées qui prendront chacune des mesures adaptées à leurs cas particuliers. À ma connaissance ce sera surtout le cas dans certaines vallées du Pays basque.

Il va bien sûr autrement lorsqu’il s’agit de langue parlée par des dizaines de millions de personnes de toutes les générations. C’est le cas des langues berbères, mais la situation, nous l’avons vu, est inverse : la décision d’officialisation a été prise, mais n’est pas vraiment appliquée, en partie du fait de difficultés réelles, en partie pour des raisons politiques, les pouvoirs pensant que le problème se résoudra par l’arabisation si on continue à traîner.

Là aussi le problème serait efficacement résolu par une décentralisation, mais le gouvernement central va crier au séparatisme !

Un phénomène mondial très naturel

Cet écrasement des langues minoritaires est un phénomène général. En effet on est passé de sociétés villageoises où la langue locale était effectivement parlée, qu’elle soit officielle ou pas, à des sociétés urbaines plurilingues où la langue majoritaire est omniprésente.

Et les mariages se font alors en partie avec des partenaires de la langue majoritaire ne connaissant pas la langue de l’autre. Alors, sauf militantisme de la part du conjoint « minoritaire », sa langue n’est pas transmise aux enfants, ou pour quelques expressions seulement.

C’est massivement le cas en France, tant pour les langues indigènes que pour les langues immigrées (chronologiquement, de l’italien aux langues africaines). À la limite, ceux qui veulent préserver à tout prix la transmission de leur langue devraient s’opposer aux mariages mixtes…

En conclusion, l’avenir d’une langue locale dépend d’une multitude de critères démographiques, politiques et sociologiques, parmi lesquels l’officialisation ne joue pas un rôle déterminant.

Yves Montenay

23 commentaires sur “Faut-il sauver les langues menacées : occitan, corse, berbère… ?”

  1. Bonjour, il ne suffit pas de décréter qu’un âne doit boire, s’il n’a pas soif, il ne boira pas…Je pense qu’une « langue régionale » s’apprend d’abord parce qu’on l’aime, et cela se fait d’abord dans la famille, auprès des anciens, au moyen de contes, de chansons, puis plus tard dans des cercles « folkloriques », par la lecture et la pratique, avant de la transmettre à son tour.
    il faut aussi se mettre d’accord sur ce que recouvre le terme régional: il y a au moins 5 Bretons différents, et il n’est pas certain qu’un Trégorrois comprenne bien un Vannetais…à l’est, en Alsace-Moselle, cohabitent 8 dialectes germaniques différents, et les gens de St-Louis (68) comprennent mieux les Bâlois que les Strasbourgeois…j’imagine qu’on peur en dire autant en Corse, en Savoie, où tout peut changer d’une vallée à l’autre!

    1. Merci. Voir mon autre réponse sur la différence entre le culturel et le pratique, officialisation par exemple, qui n’est que parfois nécessaire et souvent pas suffisante (le français hors Québec au Canada par exemple)

  2. Toute langue qui disparaît est une perte culturelle et sociale. La France a déclaré que le français est la langue de la république. Et cela bien au détriment des langues régionales. Vous sous souvenez du slogan: « ne pas parler breton et ne pas cracher par terre! Ça donne une idée de la lutte à mener.
    Quel appauvrissement pour la France d’avoir combattu les différences régionales.

    La langue berbère est plus présente que le pense l’auteur de cet article. Il y a une littérature en berbère au Maroc, entre autres.
    Les USA ne connaissent pas de langues officielles. L’anglais l’est de facto.
    Au Canada, la lutte pour la survie du français a eu des effets très encourageants, p.ex. la création d’une université de langue française à Toronto. Cette université a été voulue par les entrepreneurs de l’Ontario qui tablent sur une plus-value culturelle.
    Bilinguisme ne veut pas dire perte d’une langue au profit d’une autre.
    Pourquoi vouloir interdire les mariages mixtes? quelle aberration! C’est enrichissant pour les enfants (et pas seulement) que de profiter de plusieurs langues et cultures.

    1. Merci pour votre commentaire. Si vous relisez attentivement mon article vous verrez que nous nous ne divergeons pas tellement.

      Simplement je me place d’un point de vue pratique : décréter une officialisation ne suffit pas, comme le montre l’exemple des languesb erbères, question que je connais bien, voir mes articles sur ce sujet sur mon site yvesmontenay.fr
      Et que l’officialisation est une peine et de l’argent perdu dans certains cas comme l’occitan
      Cela n’enlève rien à l’aspect culturel à sauvegarder

  3. Il y a un an ou deux, je discutais avec un guatémaltèque qui me faisait remarquer que cinq siècles de colonisation espagnole, parfois brutale, n’ont pas éradiqué son dialecte maya. Si les gens sont attachés à leur langue, ils l’utilisent, tout simplement, et il n’y a pas besoin d’officialisation.
    Le Romanche est une des langues officielles de la Suisse, mais est en voie de disparition. Si les gens n’ont plus envie de parler une langue ou n’y trouvent plus d’intérêt, elle s’éteint naturellement.

  4. Tout cela est très intéressant. Je ne possède aucune connaissance en matière linguistique. En revanche ce qui m’apparaît évident, c’est que la résurgence des cultures linguistiques locales (ou minoritaires, pour reprendre la distinction opérée par l’auteur de l’article), est le pendant de l’exaspération des identités (mouvements identitaires) pour lutter contre les ravages uniformes de la mondialisation (et son corollaire, la suprématie de la langue anglaise). // Ce mouvement en marge des nouveaux populismes, vient se heurter au républicanisme jacobin.// L’approfondissement de l’intégration européenne devrait, à mon sens, conforter paradoxalement cette tendance. Puisque les langues nationales (les dominantes, selon l’auteur) auront alors tendance à se soustraire les unes aux autres. En somme, ce pourrait être le retour à la situation qui prévalait sous Charlemagne et Charles Le Quint, ou dans les cités-Etat et principautés germaniques et italiennes. // Tous les européens finiront par parler anglais ( c’est déjà en voie de réalisation) comme langue officielle et d’affaires, en même temps qu’ils pratiqueront dans les domaines culturelsne une seconde langue régionale (le français d’oil devenant une langue régionale de l’Union européenne parmi d’autres , comme le Basque, le Corse, etc. // Alors faut-il défendre les langues minoritaires ou locales ? Oui, à commencer par le français !

    1. Je suis d’accord avec vous pour l’anglais. Pour le français, sans l’Afrique il deviendrait également une langue locale. De même, l’espagnol est resté international grâce à l’Amérique latine, et le portugais grâce au Brésil et aux anciennes colonies africaines. Quant à l’avenir de la francophonie africaine, c’est un vaste sujet que j’aborderai une autre fois.

      Cela s’écarte de mon article, qui voulait distinguer entre l’aspect sentimental et culturel, et le côté pratique : dans le cas de l’occitan et de bien d’autres dans le monde entier, les locuteurs disparaissent, et les militants apprennent dans de rares école une langue normalisée qui n’est pas celle de leurs grands-parents. L’officialisation est une opération lourde et coûteuse, et en général inefficace. Il faut la réserver aux endroits où toutes les générations la pratiquent dans une proportion suffisante, en Kabylie par exemple … Mais jusqu’à présent cette officialisation n’y est que théorique

  5. Vous avez raison, je me suis écarté du sujet de votre article. // Ce que je voulais dire, c’est que je pense que la question de la conservation des langues que j’appellerai « mémorielles » est en réalité déjà derrière nous : on aura déjà bien du mal à assurer l’avenir de la langue française en Europe ( et dans le monde) pour ne pas depenser et investir en plus dans l officialisation identitaire des langues « mémorielles.// Dans cette lutte d’influence vitale, il faut effectivement tenir compte du rayonnement linternational d’une langue, en l’occurrence pour nous du français. Pour le reste, au-dela des aspects sentimentaux et des pratiques locales, ce sont des revendications identitaires qui de toute façon, à mon avis, ne résisteront pas au rouleau compresseur de la mondialisation. C’est bien d’ailleurs tout le problème.

    1. C’est en gros mon avis. Je lui dis plus diplomatiquement et néanmoins je fais de la peine à beaucoup de militants.

      Certes, en pratique la limite et difficile à fixer entre l’occitan qui ne vaut pas cet effort, les langues berbères qui rassemblent des dizaines de millions de locuteurs de toutes générations, mais qui sont diverses et loin d’être normalisées en une langue unique et par ailleurs menacées par l’arabe, et le français donc je suis un militant.

      1. De quel vous permettez-vous ces propos méprisants contre l’occitan ? Toutes les langues doivent être traitées à égalité.Sa situation est critique car situé sur le territoire d’un Etat qui refuse de respecter sa diversité linguistique et d’appliquer les textes internationaux.Le combat pour les langues est un combat pour les droits de l’Homme.Bien sûr qu’il faut la reconnaissance officielles des langues du territoire

        1. Relisez mon article. Il n’y a rien de méprisant, je suis purement factuel et vous avez remarqué que je ne tombe pas dans le défaut de parler de dialecte ou de patois. Simplement en tant que chef d’entreprise je suis opposé au gâchis et aux complications administratives, surtout lorsqu’il y a de très grandes chances qu’elles soit inutiles. Je rappelle ma conclusion : dans le cas de l’occitan on est dans le domaine de la liberté individuelle, ou de l’action municipale là où cela se justifie. Cela n’enlève rien à la culpabilité des gouvernements jacobins, mais c’est du passé et aujourd’hui il faut voir la situation telle qu’elle est.

    2. J’ai envie de dire, avec ses centaines de millions de locuteurs, le français est très loin d’être en danger, et toutes les ressources qui sont dépensées pour sa protection ou sa défense sont tout bonnement gaspillées.

      1. Le français est une langue mondiale, menacée à certains endroits (le Canada hors Québec malgré l’officialisation et même disparu dans des zones où étaient majoritaires aux États-Unis… et dans les bureaux de l’Union européenne). C’est une langue qui progresse dans d’autres endroits, et qui devient notamment langue maternelle dans les grandes villes africaines. Je n’ai pas connaissance de « ressources qui sont dépensées pour sa protection ou sa défense », à part bien entendu l’enseignement là où il est langue officielle.

  6. Pour l’intercompréhension, il n’était pas nécessaire de chercher très loin pour trouver une étude informelle datant du début du XXème siècle, qui montre que l’intercompréhension était la norme: http://taban.canalblog.com/archives/2013/02/07/26360074.html

    De plus, personnellement, en tant que (néo-)locuteur gascon, je comprends les autres dialectes sans problème. Pour la conversation avec les seniors, en général j’y arrive également très bien, j’ai eu des difficultés une fois, cet été, mais au bout d’un quart d’heure nous nous comprenions bien mieux.
    Autrement dit, il est essentiel de se renseigner auprès des locuteurs avant

    De plus, il y a l’espagne, qui a officialisé l’occitan alors qu’il n’y est parlé que dans une vallée, mais ça n’a pas l’air d’être un échec – la langue y est parlée désormais par environ 60% de la population, et Aran peut potentiellement fournir un corpus utile au reste de l’occitanie.

    1. Merci pour votre témoignage sur l’inter compréhension, mais il date de plus d’un siècle et vise des personnes professionnellement mobiles traversant des zones où les locuteurs des variétés de l’occitan étaient majoritaires. Donc ce n’est pas très étonnant. Mais ces données ont énormément changé depuis : il s’agit aujourd’hui de personnes âgées qui ont pas croisé des locuteurs d’autres dialectes et ultra minoritaires dans un monde francophone.
      Merci aussi pour ce coup de projecteur sur le Val d’Aran, mais il faut rappeler à nos lecteurs qu’il s’agit d’une petite vallée ayant moins de 10 000 habitants, et que cette situation est classique dans des endroits analogues : les vallées basques des Pyrénées, les vallées francophones de la face alsacienne des Vosges avant, après et pendant la période allemande, alors que la population en aval était germanophone depuis toujours et que le français y a été interdit de 1871 à 1918

  7. La réponse à,la question-titre a été donnée par l’auteur de l’article et par certains commentateurs. Je la recopie « L’officialisation est une opération lourde et coûteuse, et en général inefficace ».
    Si par exemple, on prend le cas du catalan (autour de Perpignan, par ex), son officialisation poserait de gros problèmes sociaux: au nom de quoi, demanderaient certains locuteurs de langues régionales non « historiques » mais…réelles et lourdes de pratiquants aujourd’hui, cette langue (le catalan) est imposée comme prétendue « langue régionale » ?
    Promenons nous dans les rues de Perpignan: on entend quoi, comme langue « régionale » ? Pas le catalan (sauf dans les stations de ski du Capcir ou de la Cerdagne très appréciées des Barcelonais), mais plutôt l’espagnol, l’arabe ou le vietnamien ! Officialiser une langue dite « régionale », et classifiée comme telle par une minorité de militants ou de responsables politiques démagogues, ce serait inéluctablement ouvrir la boite de Pandore: toutes les communautés locales exigeraient alors que leur langue vivante et populaire soit officialisée, AUSSI. Ce serait alors la mort totale du catalan qui serait submergé alors que, aujourd’hui, il bénéficie du soutien discret mais efficace (mais élitiste aussi, voire ségrégationniste) de l’État français et du département français P.O.(et de la Région Occitanie). Bref: les idéologues des langues régionales (je ne parle pas des amoureux et pratiquants des langues régionales historiques) feraient bien de faire attention avant de demander l’officialisation de leur langue chérie: ça pourrait se retourner contre eux.
    L’autre exemple de l’inutilité de certains moyens logistiques de soutien à une langue, c’est tout simplement le cas du français: la Francophonie officielle peut bien se plier en 4 pour promouvoir le français dans le monde, ça ne servira à rien, si les entreprises françaises travaillent ou recrutent en anglais, et si les Français parlent anglais (au travail, en voyage, etc) aux autres Français ou aux Étrangers désireux d’apprendre le français !

  8. Bonsoir. Merci pour cet article qui jette un regard sur les efforts de conservation des langues locales. Oui, la question est très différente suivant les régions concernées. Vous parlez de l’alsacien qui pourrait être nourri par le corpus de l’allemand. Pour ma génération, et plus encore pour la précédente, il l’est effectivement, et dans les conversations entre « boomers » (excusez l’anglicanisme !) on retrouve beaucoup de dictons et d’allusions en allemand. Mais là aussi, l’un des commentateurs fait allusion aux 8 alsaciens différents. Par mon expérience, il y en aurait même beaucoup plus. Je vous cite : « En effet on est passé de sociétés villageoises où la langue locale était effectivement parlée, qu’elle soit officielle ou pas, à des sociétés urbaines plurilingues où la langue majoritaire est omniprésente. » (ligne 10 avant la fin de l’article). En particulier dans ma région d’origine, l’Outre-Forêt, on pouvait reconnaître le village d’origine d’un interlocuteur en échangeant quelques phrases avec lui. Vu la densité de villages dans cette région, vous imaginez la variété des parlers. L’histoire des guerres et des mouvements de population dans le Nord de l’Alsace peut grandement expliquer cette variété : il a fallu repeupler la région après la guerre de Trente Ans (= la « guerre des suédois »), en important des « laboureurs » des quatre points cardinaux.
    Il est sans doute important de conserver non pas intégralement les langues régionales, mais au moins des « textes » typiques illustrant l’Histoire.

  9. Pour commencer, vue la variété et les durées des activités non productives des 8 milliards d’humains, les 5000 à 10 000 langues inventées par homo sapiens doivent pouvoir être pratiquées … …
    Zoom ou whatsapp sont des boosts qui pourraient être décisifs. Car pour toute langue, la parler suppose des interlocuteurs Cf langue des signes ou esperanto pour lesquelles il est difficile de pratiquer dans la vie pratique.
    La synthèse vocale puis la reconnaissance vocale peuvent permettre de la formation volontariste. (les e-joueurs s’entrainent au moins 100 heures avant d’oser interagir avec les autres.

    Mais, au delà de la liberté sur ses loisirs , la question clé est : que gagnent les autres du fait que certains, quelques % pratiquent des langues exotiques non dominantes ?
    Quel % d’une population peut être trilingue (maternelle, locale, anglais) ou (maternelle, anglais 2ème langue mondiale).

    Perso, je laisserai les vraies régions, pas les fausses ni les états jacobins construits à la force du glaive, avoir leur politique en matière de langues pratiquées par leurs habitants : éducation, arts, culture, échanges mondiaux tant économiques que touristiques ou culturels… Les états sont pulvérises par la mondialisation, restent les vraies régions avec de vraies et profondes identités.

    1. Le problème, en France, est qu’il y a maintenant très peu de jeunes et d’adultes qui ont une de ces langues comme langue maternelle, sauf exception locale

      À l’étranger, c’est différent

  10. Je suis assez d’accord avec le commentaire précédent.
    Si les gens veulent vraiment apprendre une langue, il y a une profusion d’outils qui permettent de le faire de nos jours.
    Pour bien contribuer à diffuser le corse ou l’occitan (par exemple), quelques-uns pourraient se dévouer pour faire un cours au format de Duolingo, qui fournit déjà un cadre bien défini. Je vois d’ailleurs passer des demandes pour ces cours de temps en temps.
    Le cours d’esperanto de Duolingo est le fait de trois ou quatre contributeurs, a un peu plus d’un an maintenant, et a capté plus de 100000 inscriptions en un an (pour comparaison, le portugais a 300000 inscrits, et c’est un cours plus ancien).
    Et ça ne coûte rien à l’Etat central.

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