En quelques années, les perceptions réciproques de la Chine et de l’Occident se sont transformées. La complémentarité d’hier laisse aujourd’hui la place à la défiance et même au divorce politique et économique. Mais le divorce est-il encore possible ?
Il y a encore peu, les deux se voyaient complémentaires. La Chine absorbait à toute vitesse l’argent, les hommes, les méthodes et les techniques occidentales pour se développer, et ce développement chinois donnait aux entreprises occidentales l’accès à un eldorado. C’était à la fois l’usine du monde, ce qui a largement profité à Apple, et un marché fantastique, actuellement le plus important de la planète.
La perception actuelle est presque opposée : son développement a fait de la Chine la deuxième puissance mondiale et probablement bientôt la première. Cette puissance est de plus en plus orgueilleuse et hostile, les entreprises étrangères y sont bridées et pillées de 1000 façons, tandis que les coûts salariaux y sont de moins en moins compétitifs.
Et par-dessus tout la Chine prend plaisir à attaquer les démocraties dans leur essence même, en promouvant un système politique qui arrange bien les dirigeants notamment africains, mais pas forcément leurs populations, et encore moins celles de l’Occident habituées à la démocratie.
C’est le divorce
Un divorce politique, qui n’est certes pas nouveau, mais qui s’accentue, alors qu’on imaginait qu’il disparaîtrait avec le développement.
C’est aussi un divorce économique avec une remise en cause du capitalisme qui a pourtant tant apporté à ce pays.
Ce divorce est difficile parce que tant la Chine que l’Occident continuent à avoir de mille façons besoin de leur complémentarité qui a maintenant plus de 30 ans.
Bref si le divorce idéologique revient en force, le divorce économique s’avère plus complexe à mettre en œuvre, États et entreprises n’ayant pas les mêmes motivations.
Au grand dam des entreprises occidentales, le gouvernement américain, après leur avoir interdit de coopérer avec Huawei dans la 5G, vient d’interdire certains achats réputés « sensibles » à 103 nouvelles entreprises chinoises accusées d’être « des utilisateurs militaires finals ».
Les politiques américains ont abandonné leur rêve de la démocratisation par le développement.
On avait en effet longtemps pensé que c’était la pauvreté qui générait les dictatures et que, développement aidant, la démocratie s’imposerait d’elle même. Le raisonnement était le suivant :
- Quand on est pauvre, on ne pense qu’à la nourriture, en cultivant si on est paysan, sinon en gagnant quatre sous pour en acheter. Et il faut sans cesse veiller à ne pas se faire violenter ou tuer par ceux qui veulent vous prendre le peu que vous avez. L’autorité, même rude, est bienvenue.
- Quand on commence à être à l’aise et assuré de pouvoir se payer ses repas, on commence à penser à autre chose. On constate que l’autorité peut être prédatrice et qu’elle gêne notre liberté. C’est ainsi que l’on devient démocrate.
Ainsi George W. Bush déclarait, en 1999, que « la liberté économique crée des habitudes de liberté. Et les habitudes de liberté créent des désirs de démocratie… ».
Et en 2000, on faisait entrer la Chine à l’Organisation Mondiale du Commerce au nom des libertés économiques, pensant ainsi promouvoir en même temps les libertés politiques.
Le raisonnement était même parfois géopolitique : « Les guerres, c’est bon pour les pauvres, les pays civilisés commercent et constatent que c’est bénéfique aux deux parties ».
Bien entendu, ceux qui tenaient ces discours oubliaient les guerres entre pays riches, pourtant très nombreuses en Europe occidentale. Ils oubliaient aussi les dictatures acceptées par « les classes moyennes inférieures » qui réprimaient les élites politiquement libérales et les classes « dangereuses » pauvres.
C’est le cas du fascisme, du nazisme et des innombrables populismes, mais ils sont souvent présentés soit comme des exceptions à la règle générale de démocratisation par le développement, soit comme une réaction à un événement exceptionnel, tel que l’hyperinflation en Allemagne pour expliquer la montée du nazisme. Rappelons les chiffres de cette hyperinflation des années 1921–23 : pour une base de 1 en 1914, l’indice des prix était à 10 après la guerre et à 1000 milliards en novembre 1923 !
Cette théorie sympathique de la « démocratisation spontanée » oubliait que la prise de pouvoir autoritaire ou dictatoriale venait souvent de l’action d’un petit groupe, tels les bolcheviques dans la Russie de 1917. Certes, ils exploitaient une situation nationale difficile, la première guerre mondiale en l’occurrence, mais qui avait bien d’autres solutions possibles comme en ont témoigné les autres pays européens et aujourd’hui les pays asiatiques…
Bref, une fois de plus, les optimistes furent désavoués.
La « désillusion Xi » et l’évolution vers la dictature
Nous avons vu dans mes articles précédents la dérive dictatoriale du président Xi Jinping avec le durcissement du contrôle social : généralisation de la reconnaissance faciale pour les actes courants, contrôle des réseaux sociaux, contrôle politique, dont celui de Hong Kong, et celui de la pensée et du travail des Ouighours…
Le coronavirus pousse à la dictature et pas seulement en Chine
La plus récente des innombrables victimes a été Ren Zhiqiang. Ce dernier, membre du Parti Communiste Chinois et magnat de l’immobilier chinois, fut accusé en 2016 de « salir l’image du Parti et de la Chine », officiellement pour des faits de corruption, mais en fait pour avoir critiqué la censure croissante que le Président Xi Jinping faisait subir aux médias chinois. Il a ajouté à ses premiers torts celui de critiquer la gestion du Covid-19. Il fut condamné en septembre à 18 ans de prison.
Nous avons vu également que si le développement économique de la Chine n’avait rien de miraculeux, car tous les pays sérieux font de même, même si, hélas, ces pays sérieux ne sont pas nombreux : outre les pays occidentaux qui l’ont été (en gros) depuis toujours, sont apparus le Japon puis Singapour, Hong-Kong, la Corée du Sud, Taiwan et bien plus tard la Chine.
Il est néanmoins impressionnant de voir un pays de 1,4 milliards d’habitants prendre sa place normale, c’est-à-dire 20 % de la planète à tous les points de vue, militaire compris…
C’est ce développement impressionnant qui a nourri l’orgueil du président Xi, et probablement celui d’une majorité de Chinois. Cet orgueil semble l’avoir convaincu que son système était le meilleur, ou du moins qu’il pouvait s’appuyer sur ses résultats pour consolider son pouvoir et répondre au mécontentement dont certains échos commencent à filtrer.
D’où un retour à la méthode maoïste de jauger chacun à partir de son adhésion à « la pensée de Xi », maintenant enseignée partout.
Il s’y ajoute le retour des cellules du Parti communiste au sein des entreprises privées : l’article de Ecole de Guerre Economique, commentant les informations d’Asia Times Financial : « Le Parti Communiste chinois officialise son contrôle sur les entreprises privées » révèle notamment que :
« La loi visant à créer des cellules de parti dans le secteur privé a été promulguée en 2000 et, en 2016, des cellules de parti avaient été créées dans 68% des entreprises non gouvernementales chinoises. Même les entreprises étrangères n’ont pas pu échapper au gouvernement chinois. 70% des entreprises étrangères en Chine avaient formé la cellule du Parti communiste en 2016 ».
Et le président XI ayant insisté pour que l’avis de ces cellules soit pris en compte par la direction des entreprises, les sanctions ne manquent pas d’arriver pour les « mauvais élèves »…
La Chine change son système économique
C’est ainsi que les entreprises privées sont placées sous la direction du parti.
On a ainsi remarqué des actions plus directes comme l’arme du crédit et l’exigence d’adapter l’activité des entreprises aux objectifs du pouvoir.
Le parti va les juger en permanence par le « Corporate credit system » : l’entreprise sera dégradée si le système repère un manquement à l’un des 300 critères parmi lesquels l’impôt, la qualité et le respect des réglementations, non seulement par elle-même mais aussi par ses partenaires commerciaux !
Xi Jinping a fini par intervenir lui-même pour empêcher l’introduction en Bourse d’Ant Group, une opération à 34 milliards de dollars (Investir Les Echos du 12 novembre). Son patron aurait alors eu une puissance financière lui permettant de remplacer des banques d’État, ce qui était son objectif affiché que l’on peut résumer par : « il est temps de remplacer ce système bancaire bureaucratique et inefficace ».
Bref le politique semble préférer le pouvoir par le système bancaire en place à l’efficacité économique.
Le président Xi semble donc se rapprocher de son aile gauche maoïste, alors que cette période a été une catastrophe pour la Chine et que c’est en devenant capitaliste qu’elle a pu s’en sortir !
Revenir à la politique maoïste, c’est dire adieu à l’innovation, l’esprit de compétition et l’énergie frénétique qui ont sauvé le pays. Alors que la Chine était fière de ses entreprises privées, élevées au rang des premières mondiales comme Tencent, Huawei ou Alibaba.
En toute dernière minute, on apprend aujourd’hui qu’Alibaba serait également dans le collimateur du pouvoir : Pékin vient d’ouvrir une enquête pour « suspicions de pratiques monopolistiques » contre le géant chinois (L’Expansion du 24 décembre).
Comment se fermer tout en continuant à bénéficier de l’Occident ?
Mais le divorce total est difficile. La Chine a bien remarqué l’apport des entreprises occidentales et cherche à s’isoler de possibles représailles tout en continuant à en bénéficier.
L’accord commercial Asie-Pacifique que la Chine vient de signer avec ses voisins de l’Est et du Sud a fait grand bruit (France Inter, 16 novembre). Il a surtout été remarqué que la Chine y avait remplacé les États-Unis, à la suite du retrait décidé par Donald Trump. Il semble toutefois que ce soit un succès diplomatique ayant peu de conséquences économiques, les pays de la région commerçant déjà largement entre eux.
Ce multilatéralisme affiché a pour but d’éviter des fâcheries dommageables pour tous, comme celle avec l’Australie : ayant critiqué la politique de Pékin, ce pays s’est fait interdire l’accès à son principal marché, tant pour le vin que pour le charbon.
Résultat : les centrales thermiques chinoises manquent de combustible et il y a des coupures de courant. Mais à mon avis, il n’est pas certain que cet accord commercial empêche Pékin de piquer un nouveau coup de colère contre un de ses voisins.
Une autre façon d’éviter des querelles est d’avoir un certain pouvoir à l’étranger via des investissements opérés sur place, d’où les efforts de séduction de la Chine en Afrique.
Ils viennent d’être complétés par la diplomatie du vaccin : la Chine se dépêche de proposer ses vaccins à prix modique dans les pays émergents, sans attendre d’avoir opéré les essais cliniques, pour y prendre pied et favoriser ses autres actions.
Mais le principal allié de la Chine pour continuer à bénéficier de l’apport occidental, ce sont les industriels occidentaux eux-mêmes
La tentation occidentale pour le marché chinois demeure puissante
En effet, les industriels occidentaux ne sont pas prêts à faire une croix sur le marché intérieur chinois.
Une illustration en est le projet de traité sur la protection réciproque des investissements. Les Européens, qui estiment être plus ouverts aux investissements chinois que l’inverse, veulent sécuriser leur propriété intellectuelle et éviter le dumping interne pratiqué par les sociétés d’État chinoises qui vendent à perte pour rafler les marchés.
L’Allemagne, qui préside l’Union européenne jusqu’au 31 décembre 2020, a donc poussé à un accord avec la Chine.
Celle-ci voulait également traiter rapidement, avant le départ d’Angela Merkel, mais seulement après avoir eu la certitude du départ de Donald Trump. On n’en est qu’au stade du projet et il faudra intégrer l’avis des États et du Parlement.
Finalement la Chine aurait cédé sur l’accès des étrangers à certains marchés mais pas sur la sécurité de leurs investissements.
Les affaires d’abord !
Donc les affaires d’abord, pour contenir la Chine, on verra plus tard !
Une autre illustration : la proclamation de la Chine d’être neutre en carbone en 2060 sert d’abord à soigner son image, mais EDF, Suez, Veolia y voient une occasion de participer aux gigantesques équipements nécessaires : pour eux, il est urgent de ne pas se fâcher avec la Chine !
Le secteur français de la culture espère lui aussi profiter du marché chinois pour ses films, mais la censure des contenus est de plus en plus forte et la distribution donne priorité aux films chinois. En 2019 il y a eu 541 films chinois, 43 Américains, 21 autres pays d’Asie et 11 français. En recettes, cela ne représente que 0,1 % du marché..;
Mais l’Union Européenne fronce quand même les sourcils : 15 juin 2020, elle a obtenu que l’OMC ne reconnaisse plus la Chine comme une économie de marché, ce qui nous permettra de lui retirer certains privilèges commerciaux et de surtaxer ses importations.
Est-ce à rapprocher du fait que l’Europe est en meilleure position que les États-Unis vis-à-vis de la Chine ? Les exportations européennes vers ce pays représentent 0,7 % du PIB de l’UE alors que les exportations chinoises en Europe contribuent pour 7 % au PIB de la Chine…
En résumé, le divorce est difficile. Mais un acteur longtemps sous-évalué est en train de s’imposer : la démographie.
Le reflux démographique va imposer des gains de productivité
On oublie souvent que le succès chinois vient en partie du « dividende démographique ».
Quand la population d’un pays pauvre voit sa fécondité baisser alors qu’il y a peu de personnes âgées (du fait de la pauvreté, voire de la misère et de la désorganisation sanitaire jusque dans les années 1980, dans le cas de la Chine), la proportion de personnes actives est forte pendant quelques décennies, la hausse des salaires est répartie entre moins de personnes et les charges de retraite sont faibles… d’autant qu’une partie de la population ne touche pas de pension.
Mais c’est une période transitoire, qui se termine en Chine.
Les enfants uniques sont maintenant adultes. Comme dans bien d’autres pays, dont l’Allemagne, la pyramide des âges est de plus en plus gonflée dans les grands âges et se creuse à la base.
L’effectif des générations tombe brusquement en dessous de 27 ans, puis de 28 ans en 2021 etc. Et le phénomène va s’accentuer avec la diminution du nombre de parents.
Mathématiquement il ne peut pas y avoir de salut par l’immigration, aucun pays au monde n’ayant de quoi « boucher les trous de la pyramide des âges » d’un pays de 1,4 milliards d’habitants. Sauf, théoriquement, l’Inde, mais c’est impensable des deux côtés pour l’instant.
Et la fécondité n’est pas prêt de repartir faute de femmes en âge de procréer en nombre suffisant puisqu’à l’époque de l’obligation de l’enfant unique, on s’arrangeait pour ne pas avoir de filles par avortement sélectif ou infanticide.
Pour compenser cette baisse de la population active, il faudra augmenter la productivité pour maintenir le niveau de vie, alors qu’on était habitué à des hausses rapides.
Or on s’accorde à dire que c’est cette hausse du niveau de vie qui permet au régime de durer.
Mais dans quelle mesure un secteur public encore majoritaire et un secteur privé de plus en plus bridé pourront-ils augmenter suffisamment la productivité ?
Le capitalisme pourrait bien se révéler incontournable.
Yves Montenay
Difficile de commenter brièvement un article aussi long, aussi complet, sur cet immense pays, le plus peuplé de la terre, dont la civilisation jadis remarquable remonte bien loin dans le temps, qui a adopté le marxisme à sa mesure pour lutter contre la pauvreté des masses, notemment en adoptant son principe apparemment contraire de la dictature bourgeoise révolutionnaire contre les paysans, les ouvriers, les intellectuels et les possédants, s’appuyant sur l’armée, l’administration et les déportations, en réalité telle que la voyait Trotsky éliminé par un Staline d’une puissance hors du commun, comme le fut Mao. La Chine possède des capacités exceptionnelles que nous voyons régulièrement à l’oeuvre et sait les utiliser, mais dans sa volonté de tout gérer le « pouvoir » commet beaucoup d’erreurs de cap et les coups de barre en sont d’autant plus violents. Que sera l’avenir? Difficile à prévoir. Mais la Chine est à surveiller. Sa montée en puissance est logique. Mais la logique chinoise n’est pas celle de l’Occident.
Les Occidentaux ne doivent pas se laisser berner par les illusions du marché chinois: derrière la carotte, il y a le bâton. L’exemple australien est bien rappelé mais il n’est pas nécessaire, car tout le monde sait ce que fait l’Etat communiste chinois actuel, maoïste ou post-maoïste: envahir (Tibet, îles du Pacifique Sud), ou enfermer dans des camps de concentration (Ouïghours et opposants politiques), épurer ethniquement et racialement ses territoires (encore le Tibet). Il faut que les Occidentaux arrêtent de confondre la Chine (sa culture, ses habitants) avec ses dirigeants contemporains, et qu’ils arrêtent de l’admirer bêtement. Il faut savoir que les Asiatiques eux-mêmes, directement menacés par la Chine, demandent aux Occidentaux d’être moins naïfs et plus lucides. Si l’Asie est mise sous tutelle chinoise, ce sera alors le tour de ses autres voisins, lointains géographiquement ou pas (dans un monde globalisé et financiarisé, la France est voisine de la Chine…). Arrêtons de déifier le marché et les bienfaits de son extension territoriale: Lénine savait que les capitalistes étaient capables de vendre la corde qui les pendrait (moi, ça ne me dérange pas qu’ils soient pendus, à condition que les bourreaux ne pendent pas les concitoyens de ces capitalistes-là…), et on sait maintenant que beaucoup de capitalistes ont continué à conquérir des marchés en Allemagne alors que Hitler était au pouvoir: on a vu le résultat ! Il faut arrêter les conquêtes territoriales chinoises, arrêter la purification ethnique « Grand Han » du continent, arrêter la mise sous contrôle total du pays: en voulant absolument continuer « à tout prix » à commercer avec cet Etat-là (car on commerce avec un Etat totalitaire en ce moment, et non avec la Nation chinoise), on ne fait que l’encourager à poursuivre sa politique dangereuse pour tous. Il faut savoir arrêter les dictateurs à temps (avant que la situation dégénère…)
Je partage tout à fait l’avis de Bihn. On a masqué l »appât du gain facile avec des théories lenifiantes qui confinent encore une fois avec l’angélisme et la naïveté. Il était temps de reagir, des deux côtés d’ailleurs.
Je me permets de poser une question : que faut-il entendre par « productivité » ? Une définition serait utile pour mieux comprendre l’argument avancé à la fin de l’article (« le capitalisme pourrait bien se révéler incontournable »). N’oublions pas qu »il s’agit d’un régime communiste . S’agit-il d’une nouvelle forme de stakhanovisme ?
Le stakhanovisme n’a pas mené l’URSS très loin. On peut imaginer une réaction analogue, mais ça ne résoudra pas grand chose. Le pragmatisme des Chinois (hors PCC) s’percevra que le système se bloque progressivement. Dans un deuxième temps Xi évoluera ou sera remplacé … Sinon la Chine n’atteindra pas ses objectifs
Merci pour votre réponse. Vous pariez donc sur une évolution analogue à celle de l’URSS, le système communiste mourra de sa belle mort, en somme.
La différence, il me semble entre l’URSS et la Chine communiste actuelle, c’est que depuis Deng Xiao Ping (grosso modo, pour faire vite) la dictature chinoise joue la carte du mensonge intégral, à savoir: l’introduction d’un capitalisme (pour dire vite) d’Etat dans son économie au nom du socialisme. Le message démagogique entendu par les masses est clair : nous ne sommes pas exploités par des capitalistes, mais nous sommes au contraire restés dans un régime socialiste (ouf ! Tant mieux) donc nous avons de quoi rester confiants et heureux. Un peu (toute proportion gardée) comme la démagogie hitlérienne qui disait: nous sommes socialistes, même si nous sommes aussi nationalistes voire racistes….mais votez quand même pour les socialistes que nous sommes (résultat: victoire électorale populaire). De fait, en Chine actuelle, le mensonge a permis l’enrichissement de la Chine (dans certaines limites, évidemment…!), et, par voie de conséquence, le non-effondrement de l’Etat dit « socialiste » chinois. Croire à un effondrement chinois similaire a celui de l’URSS est un peu illusoire, sauf à attendre 4 ou 5 générations: entre temps, Xi Jing Pin et ses potes auront eu le temps de conquérir pas mal de territoires, militairement ou politiquement (par le biais du pouvoir financier). Si la Chine s’effondre comme l’URSS après avoir dominé et exploité un milliard supplémentaire d’humains, a t-on vraiment de quoi être optimiste ? Surtout si elle s’effondre avec les populations conquises: cette perspective d’effondrement tardif ne me rassure pas du tout aujourd’hui. Je constate que le communisme chinois fait déjà pas mal de victimes dès aujourd’hui, qu’il va en faire prochainement à coup sûr si la communauté internationale ne réagit pas (d’ailleurs, il est quand même effarant de voir que le monde entier, à peu près, s’inquiète de la montée de l’islamisme radical et des crimes de Daech, mais que l’expansionnisme et les crimes du communisme chinois ne font pas réagir grand monde, sauf les voisins immédiats de la Chine. A ce train là, quand ce monde somnambule s’éveillera, il sera déjà chinois).
Comme dit dans mon article, il y a une différence de réaction entre les entreprises qui pensent à leurs intérêts (accès au marché chinois…) et les Etats qui sont plus sensibles à la géopolitique donc vont davantage dans votre sens
En effet, vous avez raison, les entreprises occidentales et les Etats occidentaux n’ont pas la même perspective: c’est parfois nécessaire et heureux (liberté d’entreprendre et de créer), mais c’est parfois dangereux et contreproductif (dégâts sociaux ou sanitaires). En matière internationale, il est clair que nos Etats occidentaux ont mis un temps fou à comprendre que les entreprises chinoises (actuelles) et l’Etat chinois, c’est pareil ! On ne joue pas au même jeu, on n’a pas les mêmes règles (et celles qui existent, celles de l’OMC par exemple, sont limitées…quand elles ne sont pas tout simplement ignorées..). Il va donc falloir que les Etats réagissent vite.Exemple, parmi d’autres: quand un navire turc va exploiter la mer hors de ses eaux officielles, immédiatement un bateau de guerre français se montre pour signifier que l’acte est illégal. Et la Royal Navy a même bougé un peu au moment des dernières négociations post-Bexit sur la pêche…! Mais quand il s’agit de la Chine, si un de ses bateaux ose exploiter des eaux internationales (voire nationales !), hors de ses eaux officielles donc, les réactions pratiques des Etats concernés (c’est à dire: le monde entier) sont quasi inexistantes: plus personne ne sort le bout de son nez (à la limite les USA, mais…timidement). Bref: on ne joue clairement pas au même jeu avec la Chine actuelle. Et la décision juridique de la Cour de La Haye sur les eaux du Pacifique est tout simplement balayée d’un revers de main énergique et méprisant par Xi Jin Ping et ses fidèles: nous avons un vrai très très gros gros problème avec la Chine qui risque d’avoir de fâcheuses conséquences sur l’Occident à court terme…
On ne peut passer sous silence le côté pervers de la sanction chinoise de son veto sur ses importations de charbon en provenance de l’Australie, qui a demandé une enquête internationale indépendante sur l’origine de la pandémie de Coronavirus. La Chine en souffre aussi et enregistre des coupures de courant.
Bien sûr. Mais c’est déjà dans l’article !
Encore une fois, je partage l’avis émis par BIHN.
Je pense aussi que l’économie doit être subordonnée au politique. « La politique ne se fait pas à la corbeille de la Bourse », comme disait le Général de Gaulle.
Heureusement, l’Union européenne vient de réclamer la libération de la journaliste qui a enquêté sur la propagation du virus du Covid-19 à Wuhan. L’interpellation européenne n’est bien sûr assortie d’aucune menace de sanction, mais on peut espérer que des pressions seront faites par la voie diplomatique. L’UE a aussi demandé le retrait de la Chine de l’OMC, au motif qu’elle n’est pas une véritable économie de marché.
Mais les entreprises européennes poursuivent effectivement leurs relations commerciales avec la Chine, comme si le monde n’avait pas changé : on continue, par exemple, à voir en France des produits Huawei en masse sur les rayons de tous les grands distributeurs.
Il est vrai que pendant la deuxième guerre mondiale, les affaires continuaient en dépit des fours crématoires.
Les USA (que ce soit avec Obama,Trump ou Biden, la politique ne changera pas en la matière) considèrent en revanche la Chine comme un ennemi sur les plans économiques et financiers, et agissent maintenant en conséquence, sans s’embarrasser des protocoles de l’OMC.
Bien sûr, il ne faut pas confondre le peuple chinois avec son parti unique hégémonique. Ce qui est inquiétant, c’est que Deng Xiao Ping semble avoir passé une alliance avec l’extrême gauche de son parti pour s’emparer du pouvoir absolu. Est-ce le retour des conservateurs marxistes ? Dans quel but ?
Nous sommes dans des économies relativement libérales, donc l’État ne donne pas d’ordres aux entreprises, sauf… je ne suis pas assez juriste pour aller plus loin.
Par ailleurs dans votre dernier paragraphe, je pense que vous voulez dire Xi et non Deng. Dans ce cas là je suis d’accord. Dans quel but ? Peut-être tout simplement le plaisir d’exercer un pouvoir plus fort. Peut-être aussi une alliance entre courants pour contrer des « libéraux »
Deng Xiao Ping fut un faux Gorbatchev. Il a libéralisé l’économie chinoise avec son fameux proverbe « peu importe que le chat soit noir ou blanc,l’important est qu’il attrape la souris », en voulant faire croire que l’efficacité économique était devenue prioritaire…..En vérité, il cachait à tout un monde, qui croyait que la Chine allait suivre les pas de l’URSS, que l’important était quand même (pour lui) que le chat soit membre du Parti. Le Chat, ce sont les entrepreneurs aux mains de l’Etat. La Souris, c’est un peu le monde autour de l’Empire du Milieu. N’oublions pas que Deng fut un soutien indéfectible des Khmers Rouges, qu’il fut l’artisan de l’agression chinoise contre le Vietnam en 1979, et qu’il a accéléré l’invasion chinoise du Pacifique Sud. Entre Deng et Xi, la continuité totalitaire est manifeste.
Puisse 2021 être une bonne année pour toute l’Asie, pour nous tous, pour tous les lecteurs de ce blog, et pour M. Montenay lui même !
Oui, bien sûr, je voulais dire « Xi Jing Pin », et non pas « Deng Xiao Ping ». Mais qu’importe Xi ou Deng, Binh a bien montré le mécanisme de la continuité dans le changement ( pratique -praxis- typiquement marxiste d’ailleurs, un peu comme la phrase « il faut tout changer pour que tout reste comme avant » dans le film Le Guépard du cinéaste marxiste Luchino Visconti en 1963).
Quant à la remarque « L’État ne donne pas d’ordres aux entreprises « , elle est bien entendu fondée au regard des lois républicaines sur la liberté du commerce et de l’industrie et la liberté d’entreprendre, mais cela n’empêche pas l’Etat d’intervenir au nom de la Nation lorsque le fonctionnement du marché ne répond pas aux besoins de la société ou crée des déséquilibres économiques (ex, les lois contre les monopoles, les sociétés de capital-risque, les subventions, aides indirectes et incitations fiscales, les garanties d’emprunt, les recapitalisations, les autorisations de fusions avec des entreprises étrangères, la protection des secteurs d’intérêt général ou relevant de la souveraineté nationale,…). Ces interventions devraient recevoir leurs contreparties sur le plan politique. Ce n’est, hélas, pas toujours le cas.
Pour le reste, nous sommes d’accord, bonne année à tous et à M. Montenay, qu’il puisse continuer à nous donner l’occasion de découvrir, réfléchir, échanger et partager !