faut-il défendre les langues régionales

Faut-il défendre les langues régionales ?

Les langues régionales françaises, de l’Hexagone (le breton, le provençal …) ou d’outre-mer (les créoles français, les deux langues de Mayotte…), assez largement oubliées par la majorité des Français, sont redevenues un objet de conflit. Considérées par les uns comme des « trésors culturels à sauvegarder à tout prix » avant que le jacobinisme ne les achève, elles sont vues par les autres comme une « survivance négligeable pouvant mener au séparatisme« .

Le débat fait rage depuis la censure partielle par le Conseil constitutionnel (*) de la proposition de loi Molac votée le 8 avril 2021 sur l’enseignement des langues régionales (**).

Mais je me demande si tout le monde parle de la même chose, et vais commencer par éliminer ce qui sont, à mon avis, de faux problèmes.

Les points sur lesquels tout le monde est ou devrait être d’accord

– Ce sont « de vraies langues », et non « des patois ». Ce terme est employé sans méchanceté dans les régions où ces langues étaient implantées, mais avait fini par prendre un sens un peu méprisant dans certains milieux. Laissons tomber ce mot « patois », cela fera une querelle de moins.

– Certaines de ces langues ont une littérature conséquente, comme le basque, le provençal ou le catalan. Remarquons toutefois que le basque et le catalan ne sont pas vraiment des langues régionales mais de grandes langues européennes dont une petite partie du territoire se trouve en France.
En tant que telles elles bénéficient d’un « corpus » (ensemble d’ouvrages ou d’œuvres écrites ou orales non seulement littéraires mais aussi scientifiques juridiques etc.) Le cas de l’alsacien est plus discuté, selon que l’on prend ou non dans son corpus les œuvres écrites en allemand (Hochdeutsch), dont l’alsacien, ou plutôt les alsaciens, ne seraient que des variantes verbales. Laissons cette discussion aux Alsaciens eux-mêmes.

– Ces langues font partie du patrimoine français et même du patrimoine de l’humanité, et il est normal de les noter, de les enregistrer et de les conserver en utilisant de l’argent public pour cela.

Maintenant passons aux autres problèmes et voyons pour commencer quelle est la situation sur le terrain,

La situation concrète sur le terrain

Aujourd’hui, les langues locales sont bizarrement divisées entre langues effectivement parlées et langues apprises à l’école… et ce ne sont pas les mêmes !

Sauf exceptions très locales, les langues effectivement parlées varient d’une ville à l’autre, sont connues par les gens âgés seulement, qui ne les pratiquent qu’avec leurs vieux camarades. Et en général les intéressés ne les écrivent pas, ou phonétiquement seulement. Autrement dit, elles sont en voie d’extinction rapide.

Par contre les langues apprises à l’école, que j’appelle les « langues de militants » sont normalisées, c’est-à-dire avec une orthographe et une grammaire fixée pour l’ensemble de la région concernée, et les élèves en ont connaissance précise. Cette langue est donc différente de celle parlée par les parents (rarement) ou les grands-parents. Et de plus elle n’est souvent pas enseignée dans la région où elle est parlée : pour le breton il y a de nombreuses écoles « diwan » hors de Bretagne… C’est dans cette langue que sont retranscrits les textes du « corpus » ou ceux traduits du français.

Au passage, cela enlève un argument à ceux qui craignent que la loi favorisant leur enseignement ne favorise un séparatisme linguistique, puisque cet enseignement a lieu souvent hors du territoire historique, et ne correspond pas à la langue parlée, dont les locuteurs ont d’ailleurs passé l’âge du militantisme.

Théoriquement, les seules langues pouvant avoir des conséquences séparatistes sont celles qui sont officielles à l’étranger, comme le catalan, l’allemand et le flamand. Mais il n’y a aucune indication dans ce sens, car non seulement leur pratique diminue rapidement, mais de plus on voit mal la Belgique ou l’Espagne revendiquer une part du territoire français, et encore moins les (assez rares) Français concernés y voir un intérêt. Et en Alsace, des souvenirs cuisants ne donnent aucune envie d’être rattaché à l’Allemagne.

Reste un point de désaccord important : faut-il officialiser les langues régionales pour les sauver ?

Les complications pratiques d’une officialisation

La réponse théorique est « oui ». L’officialisation d’une langue est nécessaire à sa survie, mais elle n’est pas forcément suffisante : il est probable que la langue officielle dominante parce que très majoritaire continuera à grignoter la langue locale même devenue officielle.

Les exemples sont innombrables : le français ou les parlers gaéliques dans les régions à majorité anglophones (Canada, Grande-Bretagne, Irlande …), les langues berbères au Maghreb et bien d’autres.

Et surtout l’officialisation coûte cher et génère beaucoup de contraintes, notamment dans l’emploi public, voire privé, qui doit être bilingue et donc en pratique réservé à certains. Je vous renvoie à mon article « faut-il sauver la langue corse ? ». J’y analyse ce problème en général dans le monde et particulièrement en Corse.

Faut-il sauver la langue corse ?

En résumé si la langue parlée ou enseignée a un indubitable intérêt intellectuel et culturel, et doit être lavée de tout soupçon de séparatisme, la situation sur le terrain minimise énormément cette question, tandis que les sympathiques partisans de l’officialisation en minimisent les coûts et les contraintes sans assurer leur avenir.

J’avoue donc ne pas bien comprendre l’importance médiatique qu’a pris ce débat.

Yves Montenay

 

(*) Conseil constitutionnel : Décision n° 2021-818 DC du 21 mai 2021 concernant la Loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion

(**) Loi 2021-641 du 21 mai 2021 relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion, dite  Loi Molac 

 

Crédit illustration : Carte des langues régionales (Education Nationale, 2012)

16 commentaires sur “Faut-il défendre les langues régionales ?”

  1. Bonjour, le basque, le catalan et le corse sont des langues vivantes. Elles sont également militantes. Le breton aussi dans une moindre mesure. L’occitan est une langue morte mais d’un grand intérêt patrimonial, avec des variantes géographiques (le provençal, le languedocien, le gascon, l’auvergnat, le piémontais) que l’on apprend par plaisir, par nostalgie ou par érudition. Dans tous les cas, ces langues appartiennent au patrimoine culturel français et il faut les préserver.
    L’aspect identitaire voire séparatiste est toujours latent, comme un volcan qui couve. par exemple, les basques français mais aussi certains aquitains ont mal accepté l’agrandissement de la Nouvelle Aquitaine au Poitou-Charentes, région non occitane. Les bretons sont aussi très attachés à leur racines gaéliques. A mon avis, le risque vient de l’UE qui en favorisant le fédéralisme, favorise aussi le séparatisme. Catalogne, Ecosse veulent faire sécession. Corse et Bretagne sont aussi attirées dans ce sillage. La langue de l’UE étant l’anglais, cela aura pour conséquence d’affaiblir le français. Là est le problème.

    1. Affirmations surprenantes et qui entretiennent la confusion.L’occitan n’est pas une langue morte(je le parle, y compris avec des jeunes, le plus souvent ceux qui ont eu la chance d’avoir un enseignement en immersion ou bilingue à parité horaire).
      Défense de sa langue et de son identité, et volonté d’indépendance sont deux choses différentes.L’UE est pour la diversité linguistique( dans les textes), mais les politiques linguistiques dépendent des Etats, et elle ne soutient pas les indépendantismes .Si on est pour la démocratie, on ne peut être que pour le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

      1. L’alsacien n’est pas une «  variante verbale(?)  » du Hochdeutsch mais une langue germanique dont le Hochdeutsch est issu . A ce titre l’alsacien s’écrit depuis le haut moyen âge ( cf abesse Herrade von Landsberg …12 eme siècle..)…. jusqu’à aujourd’hui….

        1. Merci, je connais bien « l’histoire linguistique d’Alsace et de Lorraine », des Romains à 1918, ouvrage très détaillé. Mais dans mon article je parle de l’observateur germanophone d’aujourd’hui qu’il soit français ou allemand : il va entendre un des parlers alsaciens, ne verra rien d’écrit et va donc s’exprimer ainsi.
          Pour autant que je sache, le Hochdeusch n’était pas une langue parlée, mais une création littéraire et théâtrale devenu langue commune puis langue officielle. Mais je ne demande qu’à en savoir plus

  2. Je reste perplexe sur l’appellation langue « régionale » : en Occitanie, la langue dite « régionale » est une reconstruction militante de différents parlers régionaux qui ont produit de la littérature certes, mais qui ne sont plus du tout populaires. Si on doit respecter (voire promouvoir) des langues qui ont vécu dans une région, pourquoi devrait-on se cantonner alors à une période historique choisie par des militants plus sonores ou plus actifs que d’autres ? En Occitanie, l’espagnol, l’arabe ou le vietnamien sont des langues beaucoup plus « régionales » que l’Occitan ou le Catalan, en ce moment.
    Il se pose donc un vrai problème politique en germe : si on officialise des langues prétendues « régionales », mais réellement abstraites, il y aura bien un jour des gens qui vont réclamer qu’on officialise AUSSI d’autres langues tout aussi … « régionales » et réellement « régionales ». Et là, à ce moment-là, il y aura un vrai problème. D’ailleurs, si on doit défendre des langues qui ont été « régionales » en Occitanie, on devrait d’abord commencer par le…Latin !
    On voit bien d’ailleurs, sur ce sujet, que tout vient « d’en haut », c’est à dire des bureaucraties nationales ou régionales: la promotion de l’Occitan, par exemple, faite par la région Occitanie, est une pure manifestation de l’agitation militante et politique de « spécialistes »: même les natifs de l’Hérault (par exemple) ne parlent plus Occitan et sont obligés (s’ils veulent retrouver leurs prétendues « racines » locales) suivre des cours au CIRDOC de Béziers ou aux Calendreta locales, subventionnées par les pouvoirs publics. Par contre, on entend couramment parler arabe ou espagnol à Béziers…

  3. Normalement, on pourrait défendre des langues régionales sans pour autant détruire le français: sauf que le français est déjà en perte de vitesse en France ! La défense d’une langue, faut-il le rappeler, c’est un problème de locuteurs d’abord. En France, chaque langue étiquetée « régionale » est un cas à part: malheureusement, certains essaient démagogiquement de tout mettre dans le même sac pour faire plaisir aux minorités « opprimées ». Le cas « Occitan » n’a rien à voir avec le cas du Corse ou du Breton: personne ne parle occitan en dite « Occitanie », à part les anciens dans leur village exclusivement (incompris dans la ville, plus loin). Mais tout le monde parle latin, car la langue française est du latin évolué (comme l’occitan ou le catalan). Donc, pourquoi pas officialiser le latin ? On peut certes faire la promotion de l’Occitan: pourquoi pas (belle histoire, belle littérature), mais on doit prendre conscience des risques politiques pris: dans cette promotion totalement…abstraite, on fait le choix d’exclure des langues « régionales » réelles (En Occitanie: l’espagnol et l’arabe). Forcément, un jour, il y aura des gens et des associations qui réclameront la reconnaissance de leurs réelles langues parlées (avec une réalité historique incontournable, aussi, dans le Sud de la France): attention à l’engrenage..!
    Pour le français, ce sont les locuteurs qui décideront de son avenir: en ce moment, les élites françaises ont fait le choix de l’abandon de cette langue. Nos élites sont plus « collaborateures » avec la langue étrangère dominante que les élites françaises sous l’occupation allemande du 20ème siècle: le linguiste Claude Hagège faisait déjà cette comparaison il y a quelques décennies. Cette situation est pitoyable et peu glorieuse pour les Français dits « cultivés »: ils pourraient POURTANT pratiquer l’anglais sans abandonner le français: mais non, ils préfèrent tout de suite la collaboration avec la culture dominante. Belle médiation à faire sur les réflexes des élites françaises.
    Dans ce contexte culturel, la promotion des langues dites « régionales » ne va pas changer grand chose pour la langue française déjà abandonnée par les Français, (mais pas par les Africains, les Québécois ou les Belges): par contre, elle va faire la promotion indirecte (à terme) d’autres langues « régionales » à prétention internationale: l’arabe et l’espagnol en Occitanie. Ce sont donc bien les Français eux-mêmes (et non l’UE ou les anglo-saxons) qui détruisent leur propre langue..!
    Au lieu de faire la promotion de variétés multiples du latin, ou la promotion de langues minoritaires (la défense généreuse de langues minoritaires respectables ne devrait pas mener inéluctablement à leur institutionnalisation officielle), les Français feraient mieux de défendre sur leur territoire une seule variété du latin (celle en cours: le français) et d’éduquer les citoyens aux langues internationales en cours (l’anglais bien sûr, qui est aussi une magnifique langue. Mais l’arabe, le Chinois, ou d’autres variétés plus vivantes et plus internationales du latin, telles l’Espagnol ou le Portugais, etc…).

  4. la Bretagne fut la plus étendue région de France et la moins  » latinisee  » face à la romanisation de Jules César )c’est bien une langue indo européenne comme l’allememand qui est proche phonétiquement du breton .les Galois comprennent le breton,enfin l’identité Celte est bien présente en Bretagne ..jusqu’en Australie et même certaines contrées d’Afrique du Nord jouent de la cornemuse on voit bien lors des festivals en Bretagne ceux et celles qui viennent des 4 coins du monde affirmer cette identité – d’ailleurs ..la dance le chant la musique n’est ce pas la véritable identité ? A méditer ? ?

    1. Merci. Je remarque effectivement dans les pays qui se donnent la peine d’indiquer la langue maternelle de leur ressortissants (le Canada par exemple) qu’il y a de nombreux gaëlophones, irlandais, galois,écossais ou autres

  5. Les prétendues « identités » régionales ne sont pas plus précises et stables que les prétendues identités » nationales. D’autant que les identités peuvent être « meurtrières », surtout si elles sont animées et revendiquées par des militants à l’ouverture d’esprit limitée. Aujourd’hui un Occitan parle plus le français,l’espagnol, l’arabe, ou le vietnamien qu’une des langues étiquetées  » occitanes », et pourtant ce sont de vrais…Occitans ! Quant à l’identité dite « bretonne », heureusement (pour les Bretons) qu’elle ne passe plus par le culte de la Cornemuse ! Gilles Servat, Alan Stivell, Tri Yann,, etc en sont la preuve… »électrique » ! Et c’est pareil pour le Rap: c’est aussi…breton ! Bref: il y a quelque chose de réactionnaire à vouloir absolument restreindre une identité à ce qu’on sait d’elle…au passé ! Surtout, cas aggravant,si on veut reproduire un passé (une langue, par exemple) soigneusement sélectionné par une minorité d’individus: pourquoi tel occitan (de telle époque) plutôt qu’un autre (d’une autre époque)? Pourquoi telle langue dite « bretonne » (de quelle époque ?) et pas la langue parlée majoritairement par les Bretons d’une autre époque (par exemple…aujourd’hui) ? Qui décide de ce choix ? Aimer une langue, une culture, c’est une chose très respectable et justifiée: vouloir l’imposer aux autres, surtout si ces autres sont majoritairement étrangers à cette culture, c’est anti-démocratique. L’identité, c’est un concept d’historiens, ou de sociologues, pour analyser un fait social à l’instant T, mais à l’instant T+1, l »analyse a déjà changé car les acteurs humains ont construit autre chose. Le culturalisme (essentialisme culturel) veut attribuer autoritairement (ou refuser autoritairement) une culture (une langue, par exemple, ou un style de vie) à des individus selon leur couleur de peau ou leur lieu de naissance: c’est donc une idéologie ségrégationniste de nature raciste.

    1. Qui veut noyer son chien l’accuse de tous les mots.Vous semblez ignorer tous les textes internationaux concernant les langues minorisées (charte européenne des langues « régionales », déclaration universelle des droits de l’homme,..). La seule langue imposée à tous, sur le territoire de l’Etat français, est le français.Que ce soit dans ma commune du Béarn ou en Région Aquitaine, les enquêtes ont montré que les trois-quart des habitants sont pour une politique en faveur des langues « régionales ». Il s’agit de proposer, de la maternelle à l’université , un enseignement dans la langue (en immersion ou à parité horaire) ou de la langue ( cela se fait déjà, mais trop rarement pour l’occitan).
      Les dernières phrases n’ont aucun rapport avec le sujet du respect de toutes les langues.

      1. Je ne comprends pas votre mauvaise humeur, je n’accuse personne. J’ai une position que l’on pourrait qualifier de centriste disant que d’un côté il faut reconnaître et respecter ces langues, et d’un autre côté que leur officialisation me semble être une complication démesurée et coûteuse. Dans le sondage que vous citez j’aurais probablement répondu comme les trois quarts que j’étais pour une politique « en faveur » des langues régionales. Je pense que le résultat du sondage aurait été différent si on avait exposé ce qu’est une officialisation et les contraintes que cela représente, notamment pour la majorité de la province ne parlant pas la langue en question. Je rajoute une question moins bien connue qui est que la langue enseignée n’est pas la langue parlée : l’occitan, à ma connaissance, n’est ni le provençal ni le gascon.

        1. Ma réaction s’adressait à Binh, mais j’en profite pour ajouter que seule l’officialisation des langues leur permettra de vivre, ainsi qu’un enseignement bilingue qui concernera au moins 30 % des élèves ( c’est le cas au Pays basque; en Béarn nous pouvons y arriver si le développement des classes bilingues se poursuit sans entrave. L’occitan, comme les autres langues, a des dialectes ( languedocien, gascon ,provençal,..).

          1. Je suis d’accord que c’est une condition nécessaire, mais absolument pas suffisante (voir le français dans les régions anglophones ou bilingues du Canada). Certes, au Pays basque, il y a localement une proportion suffisante de locuteurs à certains endroits. Mais il vaudrait mieux accorder exceptionnellement une très large décentralisation à ces « certains endroits », où les maires, par exemple, pourraient prendre des mesures exceptionnelles, que de se lancer dans une réforme nationale compliquée, coûteuse, peu efficace et probablement contre-productive du faît de l’agacement des non-locuteurs : approuver un affichage bilingue est une chose, autre chose est de ne pouvoir accéder à la fonction publique faute de la connaissance d’une langue locale, souvent différente de la langue effectivement parlée (cas de l’occitan ou du breton)

  6. Je vois que les postures idéologiques des prétendus « défenseurs » des dites « Langues Régionales » ressemblent comme 2 gouttes d’eau se ressemblent à toutes les postures idéologiques de l’histoire et de l’espace relatives à telle ou telle belle perspective aimable et attirante (ou à tel ou tel beau projet enviable). Il en fut ainsi de la Cité de Dieu, du Socialisme, du Libéralisme, des 35 heures, etc…). Mais l’enfer est pavé de bonnes intentions, malheureusement. Quand on nous parle de Charte européenne des langues régionales, ou de déclaration universelle des droits de l’homme, ou d’amour des Français pour les langues régionales, on ne dit strictement rien, en fait. C’est comme si on disait:  » les Français veulent de l’amour ». Oui, c’est bien, c’est beau et c’est soutenable, mais 2 questions se posent quand même: 1) c’est quoi l’amour ? + 2) comment on fait ? Pour les Langues dites « régionales », on ne pourra pas éviter la question numéro 1: c’est quoi, l’Occitan, en Occitanie ? (je prends l’exemple de ma région. Je ne généralise pas mon propos aux autres Régions) Pour ceux qui vivent en Occitanie, il est clair que la Langue Régionale de l’Occitanie, c’est l’arabe (ou l’espagnol). La langue enseignée au Cirdoc de Béziers ou aux Calendreta de la Région (Narbonne ou Montpellier) est une belle langue, qui fut parlée (UN TEMPS) en Occitanie historique, mais qui n’est plus l’Occitan Réel. C’est une langue digne d’un beau cours d’Histoire, une référence splendide de l’Occitanie, tout comme peut l’être aussi le LATIN. Mais l’Occitan réel, c’est l’arabe, ou l’espagnol (selon les villages). Question numéro 2: comment fait-on pour immerger les Occitans dans leur langue Régionale ? D’abord on commence par les consulter (Référendum) en leur demandant quelle langue régionale ils veulent que l’Etat français protège et avantage, puis…on attend les résultats ! Pour ne pas qu’une minorité de militants imposent aux autres leur choix. Pour finir, une fois la langue régionale choisie de manière démocratique (et non fasciste), on regarde si l’immersion des Occitans (par exemple) dans cette langue régionale POPULAIRE, va VRAIMENT aider cette langue régionale à durer dans un contexte international (on peut contester la mondialisation, mais elle est réelle) où la langue qui attire le plus de monde est …l’anglais ! ET là commence..une autre réalité ! Promouvoir des langues en les mettant en compétition, c’est les exposer à un combat asymétrique qui risque de les faire TOTALEMENT disparaître (surtout si elles sont quasiment mortes et totalement inutiles, et parlés seulement le samedi soir chez les copains militants ou lors des cours d’Occitan en petits groupes). Si L’Etat ou les exécutifs Régionaux imposent l’Occitan mort (celui des Troubadours) comme langue d’immersion en Occitanie, ce sera une illustration de la bureaucratie anti-démocratique qui gangrène la France et sa pseudo décentralisation, mais ce sera surtout l’assurance de la mort programmée de la langue des Troubadours, car des milliers d’Occitans réels VIVANTS se manifesteront dans les rues pour que leurs VRAIES langues régionales parlées aujourd’hui dans la rue et dans les magasins d’Occitanie, soient, elles aussi, reconnues et promues. Dans une telle compétition, l’Occitan de l’Histoire, s’il est imposé, sera haï, détesté, et balayé définitivement par les Occitans réels. Morale: dans un tel scénario bureaucratique, les idéologues militants du vieil occitan organiserons la destruction de leur bébé linguistique admirable, comme les idéologues communistes ont fini par détruire leur bébé idéal de société égalitaire et fraternelle.

  7. L’histoire nous apprend que l’idée de nation, donc projet politique, nait de deux sources.
    L’une française issue des Lumières et illustrée par E. Renan. Elle est universaliste et repose sur un projet commun. Une identité d’avenir.
    L’autre est allemande, issue de penseurs comme Herder ou Gœthe. Elle repose sur une communauté de langue et donc de culture. Elle a eu pour véhicule le romantisme.
    Parler de langue uniquement au sens linguistique est un leurre. Rapidement, l’identité fait surface avec ses ramifications politiques. Il suffit de s’inscrire à des cours de langue régionale pour se rendre compte qu’apprendre l’occitan a une autre connotation qu’apprendre la botanique. La rivalité Francophonie v Commonwealth en est une illustration.
    On comprend donc que le sujet soit brûlant et complexe.

    1. Bien d’accord, et c’est pour cela que je suis un militant de la francophonie. Mais je n’ai pas abordé ce sujet dans cet article qui se veut factuel. En résumant abusivement : du respect oui, l’officialisation non. Car on ne mesure pas les complications de cette dernière et son inefficacité. Cela m’évite d’aborder le côté identitaire qui, à mon avis, est réglé pour au moins 99 % des Français, et soulèverait donc inutilement des passions.

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