l'anglais sera t il un jour la seule langue parlee en france

L’anglais sera-t-il un jour la seule langue parlée en France ?

Actuellement, la Constitution indique que le français est la langue officielle de la République française. Pour combien de temps ? Des ministres ont dit il y a quelques années que l’anglais ne devait plus être considéré comme une langue étrangère.

Dans le cadre de la conférence pour l’avenir de l’Europe, lancée par l’Union européenne le 9 mai 2021, le mouvement politique Europe Démocratie Espéranto a organisé le 15 décembre 2021 une visioconférence sur le thème  » L’anglais sera-t-il un jour la seule langue parlée en France ? ». Cette association a pour objet de faire de l’espéranto une langue commune en Europe.

Présentation de cette visioconférence sur le site de l’Union européenne.

En attendant la rediffusion prochaine de cet événement, en voici une synthèse.

Sont intervenus deux conférenciers

Michel Feltin-Palas, journaliste à L’Express, rédacteur de la lettre d’information consacrée aux langues de France « Sur le bout des langues » dans L’Express et auteur de « Le français, une si fabuleuse histoire » (Editions Larousse).

Yves Montenay, président de l’ICEG (Institut Culture, Economie et Géopolitique), écrivain. Animateur du blog https://www.yvesmontenay.fr

Michel Feltin-Palas : les changements de langue

J’ai déjà vécu un changement de langue : lorsque je passais dans le village de ma mère, au fin fond des Pyrénées, la langue d’usage de la famille, du village, était non pas le français, mais le béarnais. Et à l’échelle d’une vie, j’ai vu cette langue devenir très minoritaire et il est très probable qu’elle aura disparu d’ici à quelques décennies.

Par ailleurs, j’ai écrit un livre sur l’histoire de la langue française, Le français, une si fabuleuse histoire. Pourquoi fabuleuse ? Parce qu’au départ, le français est une évolution du latin parmi d’autres, parlé pendant le haut Moyen Âge par quelques milliers de personnes autour de Paris. Et cette langue est devenue l’une des grandes langues mondiales. C’est assez fabuleux, parce que d’autres langues ont disparu pendant ce temps-là.

L’adjectif « fabuleux » renvoie aussi aux innombrables « fables » qui circulent sur la langue française, laquelle serait tour à tour ou simultanément « la plus claire », « la plus pure », « la langue de la liberté », etc. Fables que je tente de démontrer en rappelant cette vérité connue de tous les linguistes : si le français s’est imposé en France, c’est uniquement parce qu’il était la langue du pouvoir central.

Maintenant, l’anglais sera-t-il un jour la seule langue de France ? Pas à court terme. Mais ce n’est pas complètement impossible à long terme.

D’abord je rappelle qu’il est arrivé très souvent dans l’histoire que des populations d’un territoire changent de langue. C’est déjà arrivé en France : nos ancêtres les Gaulois sont passés au latin.

Les 4 conditions au changement de langue : l’utilité de la nouvelle langue, son prestige, le rôle des élites et le temps.

  • Concernant l’utilité, les Romains ont fait une chose très simple : ils ont fait du latin la langue officielle de l’Empire romain. Ce faisant, ils ont fait du latin la langue de la promotion sociale De même, dans les régions françaises, on a fait du français la seule langue de l’enseignement et donc de la promotion sociale ;
  • Le deuxième facteur, c’est le prestige associé à la nouvelle langue : on lui associe toutes les fonctions de prestige, la politique, la littérature enseignée à l’école, la langue de la science, la langue de la religion, la langue des grands médias … En France, cette langue de prestige pendant des siècles et des siècles, a été le latin. Il y a eu un renversement au profit du français à partir du XVIe siècle. L’ordonnance de Villers-Cotterêts chasse le latin de la justice. Les écrivains, du Bellay, Ronsard et les autres, se sont mis à écrire en français alors que pendant des siècles, on estimait qu’on ne pouvait créer de vraies œuvres qu’en latin. De même pour la religion avec la Réforme, puisqu’elle a diffusé la Bible dans la langue du peuple et non plus en latin ;
  • Le troisième facteur, c’est que les élites ont toujours le souci de se distinguer du peuple ;
  • Le quatrième facteur, c’est le temps. On estime que la fin du gaulois sur le territoire qui allait devenir la France a duré cinq siècles.

Ces conditions sont-elles remplies pour que les Français passent à l’anglais ? Pas encore.

L’utilité ? En France, on peut réussir socialement en français. Mais on observe depuis quelques années que l’anglais est favorisé, notamment dans l’enseignement supérieur. C’est la loi Fioraso, en 2013, qui modifie la loi Toubon pour favoriser l’anglais dans l’enseignement supérieur et la recherche. C’est en 2020, une série de décrets pris par le gouvernement Philippe qui subordonne l’obtention de différents diplômes de l’enseignement supérieur, des BTS ou des licences, des licences pro… à une certification en anglais.

Les élites ? Il faut dire les choses comme elles sont : dans certains milieux, le français est jugé par nature ringard et l’anglais par nature moderne (voir ma réaction). C’est très vrai dans la publicité. C’est très vrai dans les milieux de la communication. C’est très vrai, hélas, dans le milieu de la presse écrite auquel j’appartiens, c’est très vrai dans les écoles de commerce. Benjamin Griveaux, candidat à la mairie de Paris, a demandé dans son programme que le personnel des crèches s’adresse aux enfants en anglais.

Voici un petit florilège de ce que j’ai remarqué, et que vous voyez tous les jours comme moi :

  • On ne peut plus étudier à l’Ecole supérieure de commerce de Rennes. On étudie à la « Rennes School of Business », ni à l’école de commerce de Troyes, mais à la « Champagne Business School ».
  • Il n’y a plus de Semaine de la mode à Paris. Il y a la « Fashion Week ».
  • Danone vient de remplacer sa marque Taillefine par « Light & Free » et son slogan mondial est désormais : « One Planet, One Earth« .
  • On n’arrête plus des trafiquants en France, on arrête des « dealers »
  • Les équipes de France de rugby ou de foot n’ont plus d’entraîneur, elles ont des « coachs ».
  • J’ai regardé les titres des émissions de télévision française aux heures de grande écoute. la semaine du 3 au 9 octobre sur les chaînes de la TNT. Vous aviez le choix entre Chicago Fighter ou Good Doctor, Cash Investigation, BFM News, The Voice All-Stars, Atlantic Crossing, American Pickers. Et je parle de chaînes françaises aux heures de grande écoute…

Certes, il est plus facile pour une langue de se défendre quand elle peut s’appuyer sur un État. Mais à condition de le vouloir et qu’il y ait une volonté politique…

Mais le français a la chance d’avoir la francophonie et, paradoxe, il sera peut-être sauvé par ses anciennes colonies.

Interlude humoristique : « Drope moi un mail asap » par Les Goguettes

« Autrefois en entreprise on parlait français. Directeur, agent de maîtrise, on se comprenait. Aujourd’hui, c’est du win-win, Novlangue, novlangue ! On jargonne, on baragouine, pour mieux se faire entendre… »

Yves Montenay : la situation en France et la francophonie

En tant qu’ancien chef d’entreprise et spécialiste de la géopolitique du français dans le monde, je partage entièrement l’analyse de Michel Feltin-Palas et je vais développer d’autres points.

Mon intérêt pour les aventures du français ? Tel Obélix, je suis tombé dedans quand j’étais petit. Pourtant ça n’avait rien à voir avec ce que je faisais, étant en classes préparatoires scientifiques. J’ai notamment rêvé sur des cartes où apparaissaient les toponymies en différentes langues et avalé une thèse, Histoire linguistique de d’Alsace et de Lorraine, des Romains à 1918. À peine sa lecture terminée, j’ai entrepris naïvement d’écrire aux maires de la région pour leur demander l’évolution de la situation depuis. Certains ont eu la gentillesse de me répondre.

La protection juridique du français

Je vais passer rapidement sur les mesures de protection juridique du français. Il y a la loi Toubon, et la Constitution qui rappelle que le français est la langue officielle. La loi a également donné des pouvoirs à certaines associations de défense du français de pouvoir attaquer les contrevenants en justice. C’est ce que nous faisons à Avenir de la langue française dont je suis vice-président.

Ces textes sont-ils appliqués ? Non, du fait de ce qui a été dit tout à l’heure : le prestige, le poids des agences de communication. Et il y a aussi l’ignorance, notamment celle des magistrats que nous saisissons pour faire appliquer la loi Toubon.

Les langues en France

Les résidents en France parlent en très grande majorité français, mais d’autres langues sont présentes : l’anglais, les langues régionales et les langues de l’immigration.

Les langues autres que le français ne sont transmises par les familles que très partiellement, souvent par moins de la moitié d’entre elles. Elles disparaissent donc en quelques générations. Sauf l’anglais, que les familles veillent à transmettre pour les raisons que nous avons vues. Cela se limite pour l’instant à peut-être 100 000 personnes.

Cet effacement des langues régionales et de l’immigration vient principalement du rôle joué par l’école. Mais concernant l’anglais, tout dépend de la place qu’on lui assignera dans l’enseignement. Nous avons vu qu’elle gagnait en importance, et si cela allait plus loin, l’évolution pourrait être plus rapide encore que celle du Gaulois vers le latin puisqu’il n’y avait pas d’école publique obligatoire à l’époque.

Le rôle de la francophonie

De nombreux militants de la francophonie me confient : « Je ne suis pas rassuré de savoir que 10 ou 20 ou même 100 millions d’Africains (le chiffre réel dépasse les 200 millions et croît rapidement) parlent français ? Est-ce que ça va nous aider en France ? » Effectivement, pas directement.

Cela étant dit, la Francophonie a l’immense avantage de conserver au français son rôle traditionnel et donc son prestige. Nous avons vu que c’était un facteur important.

En dramatisant un peu, on pourrait dire que sans la francophonie, le français deviendrait une langue locale et nous savons ce qu’il advient des langues locales. Outre le prestige, cela conditionne aussi la nécessité commerciale de connaissance du français dans des entreprises internationales, entreprises françaises comprises.

Donc, le fait que l’Afrique parle de plus en plus français aide indirectement le français en France.

Certains pensent éviter à terme la nécessité de l’anglais grâce aux progrès de la traduction automatique. Cette technique a mauvaise presse, notamment du fait des interprètes qui se sentent menacés, mais elle a fait d’énormes progrès.

La traduction automatique écrite est maintenant presque parfaite dans les domaines techniques, même si ce n’est pas encore le cas dans le domaine littéraire.

La traduction automatique orale (vous avez un casque et micro et vous entendez l’autre dans votre langue) si elle n’est pas encore au point, progresse vite également.

En conclusion

Je partage l’opinion prudente de Michel Feltin-Palas. Nous avons des atouts, nous avons un État, nous avons un enseignement en français, même s’il ne fournit plus une langue de même niveau qu’auparavant. Nous avons la francophonie, mais elle est menacée dans certains pays, et par notre mauvais exemple en France.

En sens inverse, il y a tous les facteurs que nous avons énumérés et qui nourrissent l’inquiétude.

Pour que l’anglais soit moins puissant, il faudrait que d’autres pays et d’autres langues deviennent nécessaires et prestigieuses. Les Chinois y pensent, mais n’ont pas pour l’instant réussi la percée dont ils rêvent.

Restent l’Afrique et l’Europe, qui devraient être nos grands sujets de préoccupation, ainsi que l’état calamiteux de notre enseignement public.

 

16 commentaires sur “L’anglais sera-t-il un jour la seule langue parlée en France ?”

    1. En principe oui, mais les argots et les créoles se multiplient (nouchi en Côte d’Ivoire, camfranglais au Cameroun). Mais les intéressés connaissent bien la différence avec le français correct. Ce qu’il ne faudrait pas, c’est suivre des linguistes que je connais et qui prônent d’officialiser ces argots et ces créoles. Ce serait nuisible non seulement au français mais aussi aux intéressés que cela couperait de toute la documentation en français.

  1. La solution passe d’abord par l’école. Pour cela une obligation absolue : chasser Macron et la REM du pouvoir (et tout ce qui procède de prêt ou de loin de la gauche) et chasser tous les chefs de service et tous les inspecteurs du ministère de l’Éducation Nationale. Les enseignants, eux, seront trop heureux de retrouver une véritable manière d’enseigner le français et en bon français.

  2. Les paramètre importants à la suprématie d’une langue sont ceux du niveau de la recherche, du développement technologique et économique du pays. Tous les articles concernant les domaines essentiels sont en anglais ou systématiquement traduits en anglais.
    La Messe est dite.

    1. Oui, c’est un paramètre important, notamment pour le prestige. Et c’est abondamment utilisé au Maghreb par les anglo-saxons et leurs partisans pour dire qu’il faut remplacer le français par l’anglais. En sens inverse, ça ne touche que des milieux limités, mais il faut le répéter : ce n’est pas parce que tel grand scientifique publié en anglais qu’il travaille dans cette langue dans son labo, et ce n’est pas pour autant qu’il faut qu’un horticulteur ou un maraîcher se mette à travailler en anglais

  3. J’ai trouvé intéressante la remarque de Michel feltin-Palas à propos du béarnais. Dans mon enfance, je pratiquais lors des vacances, à côté du français familial, le patois vendéen absolument nécessaire pour jouer avec els enfants du village (qui parlaient français souramment à l’école). Ceci m’a beaucoup servi ultérieurement au fin fond du Nouveau-brunswick et en Louisiane. Actuellement, personne dans le village au-dessous de 60 ane le parle, voire ne le comprend plus.

    Personnellement, ce qui me consterne en tant qu’angliciste, ce sont les importations de « mauvais » anglais, avec des sens donnés aux mots qu’ils n’ont pas dans la langue d’origine et des importations de syntaxes impossibles. « Possiblement » ou « être en capacité de  » me donnent des boutons.

    Autres sources d’rritation, l’utilisation « chic » de tournures inutiles; On n’a plus des « soldes », mais des « sales », des boutiques ont des pancartes « open » et « closed » derrière leur porte, Bon, d’accord « Black Friday » sonne plutôt mieux que « vendredi noir », mais quelle prétention que ces écoles de commerce qui se haussent le col en s’affichant « business school ».

    Les prononciations de journalistes radio et télé ne sont pas tristes non plus. Pourquoi faut-il que « -shire » soit prononcé « chaillere » quand on n’a entendu pendant des années ses profs d’anglais prononcer « cheur » ?

    On s’est beaucoup moqué d’Étiemble et de la loi Toubon en leur temps, mais il me semble urgent de faire quelque chose pour sauver la langue, ne serait-ce qu’imposer l’usage du français dans la publicité ou les enseignes.

  4. Je me sens particulièrement concerné par le problème que vous dénoncez pour avoir publié 8 livres sur cette question et des dizaines d’articles publiés dans des revues papier ou électroniques.

    Il y a plus de 20 ans, j’avais dénombré en France pas moins d’une soixantaine d’associations qui avaient pour raison sociale la défense de la langue française, chacune publiant dans son petit coin son bulletin trimestriel, organisant ici et là une conférence, mais incapables d’établir une synergie entre toutes ces associations qui, il faut le dire, contemplent avec désolation l’évolution contemporaine de notre langue sans toutefois arriver à en identifier clairement les raisons.

    C’est justement le but que je me suis fixé en publiant une nouvelle série de vidéos sur le site d’Impératif-français, un groupe québécois qui s’est constitué pour la défense de la langue française en Amérique du nord vers 1975. Originellement, cette série devait paraitre sur le site d’UPR TV, la chaîne d’information de François Asselineau mais, en dépit des efforts des militants UPR de la région de Nice, ce projet ne put voir le jour et je doute que François Asselineau lui-même se sente vraiment concerné par ce problème puisqu’il parcelle ses propres vidéos d’anglicismes et de mots anglais non traduits. Il y a donc des questions à se poser sur l’engagement de ce monsieur qui n’a jamais répondu aux messages que je lui ai envoyés pour tenter d’avoir une explication, alors que le 17 juillet dernier, il me bombardait officiellement, dans une de ses vidéos « Responsable UPR pour la Francophonie ». Comprenne qui pourra !

    Enfin, pour en revenir à ALF, l’association que vous représentez ici, je constate qu’elle n’a absolument pas relayé la publicité que j’ai faite à l’occasion du lancement de ma série de vidéos. A l’exception de l’AFRAV en la personne de Régis Ravat, les autres associations n’en ont touché mot. Or, j’ai conçu mon programme de vidéos de façon à procurer les armes intellectuelles qui permettraient à ceux qui savent écouter de reprendre l’offensive pour corriger la situation actuelle. Quant aux organismes officiels qui touchent de l’argent public pour faire la promotion du français tels que la francophonie institutionnelle ou la DGLFLF, leurs employés s’efforcent de ne pas faire de zèle et de vague pour ne pas être mis sur la touche par leur employeur, comme ce fut le cas avec Michel Guillou. J’en sais quelque chose puisque j’ai moi-même travaillé pour l’AUF en tant que directeur de l’IFI de Hanoï jusqu’à ce que j’en sois remercié pour avoir fait trop de zèle à imposer le français à la place de l’anglais dans certains des programmes auxquels participaient des étudiants de l’institut !

    Etablir une synergie entre toutes les associations et les individus qui semblent oeuvrer dans le même sens est essentiel mais, pour le moment, je ne vois cela dans aucune des associations qui se préoccupent de défense de la langue française…

    1. Merci pour ce complément. Les associations que vous évoquez se limitent malheureusement souvent à un petit nombre de personnes qui se débrouillent localement sans moyens et pour lesquelles les petites condamnations par des magistrats ignorants la loi Toubon sont un vrai problème financier qui freine considérablement le nombre de procédures. Quant aux administrations publiques ou dans la mouvance de l’OIF, elles ont les défauts de toute administration. De mon côté je fais ce que je peux indépendamment de l’association, c’est-à-dire un peu de médiatisation comme vous le voyez pour cette conférence.

  5. « le français a la chance d’avoir la francophonie et, paradoxe, il sera peut-être sauvé par ses anciennes colonies » nous dit Michel Feltin-Palas. En ce qui concerne l’ancienne colonie »Vietnam » (mais aussi le Cambodge ou le Laos), autant oublier ce faux espoir. L’anglais est devenu LA langue étrangère de référence dans ce pays, en grande partie à cause des..Français! L’ancien directeur de l’IFI de Hanoi l’a expliqué dans son commentaire. Et, ce n’est pas l’AUF qui fera la promotion du français puisque, sur son site web, elle pratique l’écriture pointée prétendue « inclusive » qui fait fuir tous les apprentis de la langue française (et même les locuteurs usuels de cette langue). Une vraie défense du français ne pourra venir que des Français eux-mêmes: institutions, État, Intellectuels, entreprises et individus. Une vraie volonté politique interne sera nécessaire. Les anciennes colonies françaises ne sauveront pas, en soi, le français: au mieux, elles sauveront leurs français ! Ce qui est différent. D’autant qu’elles lorgnent de + en + sur l’anglais (exemple: le Cameroun). Il est possible, pour rester optimiste, que l’apprentissage du bilinguisme (mais seulement tardif, donc après maîtrise du français) permette de sauver la langue française du naufrage: la prise de conscience des identités linguistiques favorisant leur défense. Il serait par contre suicidaire de favoriser le bilinguisme dès le Primaire, voire..dès la Maternelle ! C’est pourtant dans les tuyaux…Quant à la Loi Toubon, tout le monde peut constater que personne ne la respecte: l’anglais est partout, dans nos rues comme dans nos centres commerciaux (chansons d’ambiance, par ex) ou nos transports.

  6. Comme chaque fois, j’ai attendu que mes idées murissent avant de me mêler à cette conversation. Et ne voila-t-il pas qu’en rangeant ma bibliothèque, je tombe sur « La langue française face à la mondialisation » d’Yves Montenay, imprimé en avril 2005, mais que je n’avais pas lu. Je m’y plongeais illico. Où l’avais-je acheté ? Je ne sais, mais y confrontant mon expérience dans le monde arabe et en Afrique, je n’ai rien trouvé qui la contredise. Bravo cher Yves Montenay !
    Après avoir bien entamé ce livre je peux donc entrer dans cette conversation.
    Même si j’ai apprécié le parler africain, souvent imagé et utilisant des locutions anciennes, transmises depuis leur apprentissage du temps de la colonisation, je doute que les fortes populations africaines aident le français en France. Elles vont donner des raisons aux commerciaux non français pour apprendre notre langue afin de vendre leurs produits en Afrique. Ce qui multipliera les locuteurs du français hors de France. Mais pour aider le français en France, il faut se battre contre son anglicisation insidieuse, comme le montre le petit florilège de Michel Feltin-Palas. Je le fais avec parfois du découragement devant le travail de destruction de beaucoup de francophones ayant apparemment honte de leur langue : pourquoi avoir remplacé maitrise par master en plein cœur de notre système d’enseignement supérieur ? Les Allemands anglicisent aussi à tout va, mais les Islandais sont, parait-il, le peuple qui introduit le moins d’anglicismes dans sa langue. Comme quoi on peut défendre très efficacement sa langue chez soi sans la défendre le moins du monde à l’étranger (personne n’a jamais parlé islandais hors d’Islande). Ce sont deux combats différents. Sachant que nous Français avons peu de prise sur les francophones de l’étranger (exemple négatif de l’Algérie et positif du Québec), il ne nous reste qu’à lutter en France : regrouper les associations, comme le demande Charles X Durand, et surtout employer des mots français même devant les moqueries de nos concitoyens ignares (dire i pad ou i phone et non aïe pad, courriel, numérique pour digital, autocaravane pour camping car, samdim pour week end…
    Je croyais que la Loi Toubon avait été plus ou moins invalidée par l’Europe ?

    1. Bien d’accord. Quelques compléments : une nouvelle version de mon livre est sortie en 2015, quant à de loi Toubon, j’ignorais cette limitation européenne. Pouvez-vous m’en dire plus SVP ? Pour ce qui concerne le français en Afrique, certes ça n’aura pas de conséquences directes, Mais ça jouera sur son prestige ce qui est un élément important pour être plus sûr de soi face aux anglicismes

  7. Anecdote : il y a quelques années, mon ancienne école d’ingénieur, connue depuis 1920 comme « Ecole Supérieure d’Optique », est devenue l’IOGS, pour « Institut d’Optique Graduate School ». Je pense qu’on peut difficilement faire pire que cette mixture de français et d’anglais.

  8. Sur la loi Toubon, je n’ai pas d’info. Juste lu une fois qu’elle allait contre les principes de l’UE.

    1. Merci pour cette question. Je suis en train de refaire le point. Pour l’instant je n’ai trouvé que des dispositions relatives à l’étiquetage des produits de grande consommation : une seule langue serait autorisée (en général l’anglais) si une photo ou un dessin explicite permet à tout le monde de comprendre. Donc ce n’est pas la loi Toubon en général qui serait visée mais seulement cela. Je vous en dirai plus éventuellement. Si

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