Les communautés musulmanes que nous connaissons le mieux sont aujourd’hui divisées entre vision passéiste de l’islam et modernité : de l’Iran à la diaspora européenne, en passant par le Maghreb et le Moyen-Orient, voyons comment nos voisins musulmans éclatent en une mosaïque de croyances, de pratiques et d’identités qui s’opposent entre elles.
♦ English version : Evolution of Islam in 2024
D’abord, un rappel mondial : l’islam est une religion qui aurait près de 2 milliards d’adeptes, à peine moins que le christianisme, qui en a 2,6 milliards. Elle est prise dans des mouvements mondiaux contradictoires dont les uns poussent à l’activisme et les autres à la sécularisation. Elle est majoritaire dans une partie du monde et présente par ses diasporas dans presque tout le reste.
Leurs adeptes, « les croyants », sont pris entre l’islamisme radical qui les menace autant que nous, et une tendance générale à la sécularisation. Il s’agit de populations historiquement très variées, divisées et aujourd’hui plongées dans un environnement en mutation.
Rappelons que le mot « sécularisation », une formule au départ catholique, signifie étymologiquement « vivre dans le siècle », c’est-à-dire comme les autres, la religion restant une affaire personnelle et non publique. Donc la sécularisation a un sens assez voisin de l’« intégration », avec un accent mis plus sur le côté religieux que sur le côté économique.
L’islam est une religion récente, elle a 14 siècles seulement, qui s’est superposée à des civilisations déjà existantes, ce qui explique sa variété, malgré quelques aspects unitaires comme l’appel à la prière, qui est partout en arabe, ou une sobriété des lieux de culte, qui contraste avec d’autres religions locales. Par ailleurs elle n’a pas d’autorité suprême qui pourrait limiter certaines divergences. Cette grande variété rend les analyses difficiles.
Par exemple l’Afghanistan et le Pakistan sont profondément islamistes. Si on y ajoute l’Inde, le Bangladesh la Malaisie et l’Indonésie, dont la culture nationale est imprégnée de traditions bouddhistes ou hindoues, ces deux séries de pays regroupent la majorité des « croyants ».
Et pourtant leur présence en France est très secondaire par rapport à d’autres pays musulmans que j’appelais « nos voisins musulmans » dans un précédent livre.
« Nos voisins »
Je pense aux pays de la région allant du Maroc à l’Iran et leurs diasporas en France, parce que nous avons un passé largement commun (l’empire romain, Jérusalem, les croisades, l’empire ottoman, les Barbaresques, des aventures coloniales…).
Nous nous sommes donc longuement fréquentés, pas toujours amicalement. L’histoire montre d’ailleurs que c’est d’abord avec les voisins que l’on se bat (France / Angleterre /Allemagne / Espagne…), même si on les connaît bien…
Suite à ce passé commun, ils vivent à côté de nous, dans nos villes ou dans des pays dont nous entendons parler sans arrêt, et que nombre de Français ont visité à l’occasion de leur travail ou en touristes.
Ce sont des pays arabes, à l’exception notable de l’Iran et de la Turquie, et bien sûr des Berbères du Maghreb.
Il se trouve par ailleurs que nombre d’entre eux ont des élites francophones ou en ont eu par le passé, ce qui est d’ailleurs une explication à la présence de leurs diasporas en France.
À l’inverse, le Pakistan, l’Inde et le Bangladesh ont des élites de formation britannique, et leurs diasporas se trouvent dans les pays anglophones plutôt qu’en France.
Je vais commencer par l’islamisme et sa géopolitique, pour continuer par ce qui influence nos voisins dans un sens ou dans l’autre : école, médias, rivalités internes…
Géopolitique de l’islamisme
L’islamisme ce n’est pas l’islam, c’est une prise de position politique. Elle se traduit par l’organisation de partis dont le but est de prendre le pouvoir et d’imposer à l’ensemble de la population des règles strictes que l’on fait respecter par la violence.
Le plus connu de ces partis politiques est, chez « nos voisins musulmans », le parti des Frères musulmans.
Dans le reste du monde, les partis islamistes ne sont pas les mêmes.
Ce qui intéresse en priorité le grand public, qu’ils soient musulmans ou non, c’est de savoir si l’islamisme est en progression dans le monde. En effet, la plupart des victimes des islamistes sont d’autres musulmans, même si, en France, ce n’est pas notre impression.
En réalité, les islamistes frappent tous ceux qui ne leur obéissent pas, qu’ils soient musulmans ou non.
Les mouvements islamistes, après avoir connu des moments d’ascension spectaculaire, montrent des signes de déclin, face à la pression internationale d’une part, et à leur échec à répondre aux aspirations des populations locales d’autre part.
Je pense par exemple à la chute d’Al Qaïda puis de l’État Islamique, à celle des Frères musulmans en Égypte et à la marginalisation des groupes radicaux au Maroc, en Tunisie, en Arabie, dans les Emirats, en Syrie … bref, là où il y a des pouvoirs forts.
Les islamistes progressent par contre là où le pouvoir est faible : Afghanistan, Liban, Palestine, Sahel, une partie de l’Afrique orientale,
En Palestine, par exemple, le Hamas a supplanté l’OLP, organisation faible, non démocratique et probablement corrompue par Israël. On en voit actuellement le résultat !
Chez « nos voisins musulmans », le principal pays islamiste est maintenant l’Iran, depuis que l’Arabie s’éloigne du wahhabisme.
L’influence iranienne est grande en Syrie, au Liban, à Gaza et au Yémen. Elle est plus discutée en Irak, pays à majorité chiite mais nationaliste. Les chiites arabophones d’Irak se sont en effet battus contre les chiites iraniens pendant la guerre longue et meurtrière entre ces deux pays en 1980-88.
Il ne suffit donc pas d’être chiite pour obéir à l’Iran, et inversement, ce n’est pas une condition nécessaire puisque le Hamas est sunnite.
En effet, l’autre État islamiste puissant, l’Arabie, a brusquement changé.
Le gouvernement énergique du jeune prince héritier Mohammed ben Salmane, dit MBS, a succédé à une longue période de dirigeants octogénaires, a écarté les religieux wahhabites qui contrôlaient la vie sociale, intellectuellement et matériellement avec les gourdins de la police religieuse.
La permission donnée aux femmes de conduire et l’ouverture de quelques cinémas ont été le symbole de cette ouverture.
Derrière les Etats, il y a les peuples.
Que pensent-ils aujourd’hui sur le plan religieux ?
Islam : le dogme, la légende ou l’incroyance ?
Les musulmans sont en principe dogmatiques, c’est-à-dire attachés à la lettre des écritures. Toutefois les sondages mènent à nuancer cette première impression, du moins dans le monde arabe et sa diaspora.
Les sondages nous indiquent qu’il y a toute une gradation depuis les islamistes, qui veulent imposer le respect de la lettre à tout le monde, les croyants pieux qui respectent eux aussi la lettre, mais pour eux-mêmes seulement, les croyants non pratiquants, les déistes et les athées
Une différence entre chrétiens et musulmans est que les premiers sont habitués aux discussions sur la Bible et admettent qu’une partie en soit légendaire. Plus généralement peu leur importe qu’un mythe soit réel ou légendaire, ce qui compte c’est l’idée qu’il transmet.
Par contre, le monde musulman n’est pour l’instant pas informé de la critique de l’histoire de l’islam, et le croyant de base reçoit une formation dogmatique dans son système scolaire.
En Occident, dans les familles attentives à la transmission de la religion, c’est l’affaire des parents ou de l’imam, tandis que de nombreuses autres familles ne se soucient pas de cette transmission.
Bref, les travaux des universitaires qui s’attaquent aux côtés légendaires du Coran et d’autres textes (notamment la Sira décrivant la vie de Mahomet) sont peu connus de la masse des croyants et demeurent sous la pression de dogmatiques souvent menaçants.
Voyons plus en détail comment les croyants sont informés
L’éducation et l’accès à l’information des musulmans
La différence est grande entre les pays où l’islam est religion officielle, et les autres, comme les pays occidentaux accueillant les diasporas.
Dans les premiers, l’islam est enseigné à l’école en tant que la religion légitime et nationale. C’est l’occasion de noter le cas extrême du Maroc où le roi est commandeur des croyants et réussit, de ce fait, à limiter l’influence islamiste.
A l’inverse, les membres des diasporas présentes en France suivent en quasi-totalité un enseignement laïque, y compris dans l’enseignement catholique français sous contrat.
Cette divergence est en partie comblée, ou au contraire accrue, par l’accès à l’information via internet et les réseaux sociaux, mais aussi via les télévisions du pays de départ ou des chaînes islamistes.
Examinons ces différents cas de figure.
Dans les pays musulmans
La situation de la liberté sur Internet dans les pays musulmans est extrêmement variable selon les régimes ou les événements. Toutefois la pression politique et sociale est moins forte que dans des pays comme la Chine.
Le fait que le haut de la pyramide sociale parle français ou anglais fait pénétrer des idées occidentales dans ces milieux, tandis que les médias arabophones, persophones ou turcophones, sont en général conservateurs, voire islamistes.
Cela a été le cas de la chaîne Al-Jazira, d’autant plus populaire qu’elle exprime autre chose que la vérité officielle de chaque pays, mais dont le contrôle par les Frères musulmans est apparu de plus en plus évident, ce qui lui a fait perdre beaucoup de spectateurs.
Cela a été également longtemps le cas des chaînes saoudiennes.
Dans les pays d’accueil
En général, la France et les autres pays occidentaux laissent une liberté quasi complète à Internet (réseaux sociaux et articles de presse), tandis que l’audiovisuel est assez varié et en général critique.
Pour la majorité de la diaspora, c’est donc un pas vers l’assimilation, soit avec la perte de la religion, soit en “bricolant” la religion (j’applique ceci, mais pas cela).
Pour une minorité, cette liberté, tant d’utiliser Internet que de capter les télévisions étrangères, mène au choix de lecture ou d’écoute de textes traditionalistes, voire islamistes. Cela entretient le rejet du monde extérieur.
L’orthodoxie serait de re-migrer vers un pays respectant « les lois de Dieu », mais la différence de niveau de vie en dissuade la masse, tandis que des militants sont tentés par une notoriété locale, voire la prise de pouvoir sur un groupe.
L’évolution linguistique joue aussi son rôle. En France, il est rare que la deuxième génération sache lire l’arabe. Donc, et sauf exception militante signalée ci-dessus, les intéressés se retrouvent baignés dans des univers différents de la génération précédente. Du moins sa partie populaire, le haut de la pyramide sociale étant déjà occidentalisé dans le pays de départ.
Cette évolution culturelle mène à des discussions sur une réforme de l’islam
Réforme de l’islam ou sécularisation ?
Certains intellectuels musulmans de la diaspora, dont Malek Chebel, parlent d’un “islam des lumières” nécessitant une réinterprétation des textes sacrés.
Je ne suis pas certain que ce soit bien compris par la masse des croyants qui, de toute façon, bricole souvent la religion, à commencer par la consommation d’alcool.
Dans les pays musulmans ce terme de “réforme” est employé depuis presque 200 ans, avec deux interprétations quasi opposées :
L’interprétation moderniste consiste à prendre ce qu’il y a de bien dans les civilisations occidentales. Ce fut la voie d’Atatürk et dans une certaine mesure celle de Bourguiba, voire, indirectement, celle de Mohamed V au Maroc
L’interprétation traditionaliste proclame, elle, que si la société musulmane se porte mal, c’est parce qu’elle s’est laissée corrompre par le monde moderne, et qu’il faut donc revenir à l’époque des « frères » fondateurs. C’est la voie des salafistes, un courant d’idées proche des Frères musulmans, dont ils sont néanmoins ennemis. Depuis le virage séoudien, ils ne sont au pouvoir nulle part, mais sont un groupe de pensée puissant.
Entre les deux, l’interprétation intermédiaire est celle du président turc Erdogan qui, d’une part, accepte la modernité technique et organisationnelle, mais dans un cadre extrêmement religieux dans lequel il forme la population. Ladite population est profondément divisée en parts à peu près égales entre laïques et traditionalistes, ce qui s’est traduit par la réélection du président à 52 % seulement. Et pour cela il a fallu ajouter aux voix islamistes (le président fait volontiers en public le signe de ralliement des Frères musulmans) celles d’un parti ultranationaliste.
Un Islam fragmenté à l’infini
Finalement, à mon avis, il n’y aura pas d’évolution d’ensemble de l’islam sunnite qui est un mosaïque d’écoles et de sensibilités qu’aucune autorité centrale ne fédère.
Ces sensibilités s’étagent de l’islamisme à un vague déisme, sans parler du nombre croissant d’athées parmi ceux qui « devraient » être musulmans, c’est-à-dire les immigrés, leurs enfants, éventuellement leurs petits-enfants… à quelle génération s’arrêter ?
Et cette mosaïque musulmane, ou d’origine musulmane, est encore plus fragmentée par des rivalités nationales, même dans les pays d’accueil : il n’y a qu’à voir en France s’opposer Marocains et Algériens, et, parmi ces derniers, les Kabyles aux autres. Ou encore les chiites aux sunnites, et parmi ces derniers les Kurdes contre les autres, les Turcs obéissant à Ankara et les opposants etc.
Dans les pays musulmans, il y a les guerres entre l’Algérie et le Maroc, entre la Syrie et ses voisins, entre les Houtis du Nord-Yémen et l’Arabie et les Émirats…
Cela devrait rassurer ceux qui craignent « la prise de pouvoir par les immigrés » : il n’y a pas de bloc « immigration » tant sur le plan électoral que sur d’autres. D’autant que « les immigrés » ne rassemblent pas que des Maghrébins et des Moyen-orientaux, mais aussi des Africains chrétiens, des Asiatiques et bien d’autres.
Sur le plan géopolitique, le renforcement des autocraties depuis la fin des « printemps arabes » du début des années 2010 a exacerbé les rivalités nationales, et de ce fait le fractionnement ne fait qu’empirer.
En conclusion
Pour ce qui concerne la situation en France, cette fragmentation à l’infini devrait nous pousser à éviter d’employer des termes comme « les musulmans » ou « les immigrés » qui finissent par refléter des stéréotypes de droite ou de gauche, qui ne signifient rien lorsque l’on est en face d’un individu.
On constate cette immense variété dans le travail et en politique, notamment lors des élections.
Sur place, du Maroc à l’Iran, des régimes plus ou moins autoritaires cachent également une fragmentation infinie.
D’où ma provocation exagérée et sommaire : « l’islam ça n’existe pas ». Bien sûr que cette religion existe, je veux seulement dire qu’on ne peut pas en tirer de règles générales. Je ne fais ainsi que reprendre sous une autre forme une constatation traditionnelle des musulmans : «nous cultivons la fitna », c’est-à-dire des discordes violente, voire des guerres.
La seule évolution commune me semble être celle de la sécularisation aussi bien du Maroc à l’Iran que dans les diasporas occidentales.
Yves Montenay
Cet article me semble « bisounours ».
Au niveau d’une idéologie (nazi, marxisme, islamisme) seuls comptent vraiment les 10% d’activistes. Les 90% de « pacifiques » n’ont aucune influence ni aucune action : ils ne sont pas organisés, ils n’ont pas de militants actifs et violents, ….
Concernant les frères musulmans, de nombreux chercheurs ont publié des livres documentés comme Michel Prazan et beaucoup d’autres. Une chercheuse du CNRS, Florence Bergeaud-Blackler vient de publier une étude « le frérisme et ses réseaux ». La réponse est toujours la même : menaces, et éventuellement des attaques juridiques (le djihad judiciaire)…
Si j’enlève le mot « bisounours » je suis totalement d’accord avec vous. Les islamistes sont des ennemis et ils méritent une réponse ferme et mieux adaptée de la part du système policier et judiciaire français. En Egypte on ne plaisante pas et ils sont pendus.
Mais je fais des articles d’analyse, pas « de gouvernement ». Le fait que la majorité des musulmans n’est pas islamiste, et est souvent leurs victime principale, est un fait, et je ne vois pas pourquoi je ne le signalerai pas.
Et surtout la perte de la foi au fil des générations (je suis démographe, mon unité de temps est de la génération c’est-à-dire 20 à 40 ans), y compris dans les pays de départ (voir l’Iran, mais aussi la Tunisie et …), est un fait souvent ignoré et que je me dois de signaler
Moi je ne trouve pas cet article « bisounours »… mais plutôt intéressant. Et je suis d’accord avec la conclusion, pour ce qui est d’éviter d’employer des termes comme « les musulmans » ou « les immigrés ». Tout comme « les écologistes » , « les communistes » , « les agriculteurs » et j’en passe. Toutes ces familles sont effectivement fragmentées à l’infini, ou presque. Quoi qu’il en soit ces étiquettes ne signifient rien lorsque l’on est en face d’un individu.
Cet article rejoint, du moins il me semble, celui de Mohamed Adel Mtimet (chercheur, spécialiste de philosophie politique et membre de Vigilance Universités) publié le 21/11/2020 sur Marianne. Et qui parle de… confusion : « Sortir de la confusion entre musulmans et islamistes »
https://www.marianne.net/agora/humeurs/sortir-de-la-confusion-entre-musulmans-et-islamistes
Merci pour votre appui de favoriser l’individuel par rapport aux étiquettes. Je vais dire le texte que vous me signalez, mais son titre « sortir de la confusion entre musulmans et islamistes » ne peut qu’avoir mon accord !
né au maroc et vécu 25 ans, j’ai pas mal d’amis maghrébins… aucun n’est islamiste… Mon interrogation porte sur le « que faire », en France, face aux islamistes de toutes variantes et couleurs ? Je vois mal se contenter d’attendre…
J’ai aussi beaucoup d’amis et de connaissances maghrébines ou d’ascendance maghrébine et aucun n’est islamiste. Néanmoins ces derniers existent et il faut que la police et la justice fassent leur travail (Voir ci-dessus)
Merci beaucoup : cet article très instructif contribue à mieux comprendre le phénomène musulman, quelle que soit l’opinion qu’on en a.
Alors que, sauf exception, les religions chrétiennes se sont dégagées en Europe de leur « gangue » de pratiques rituelles ou de superstitions, l’islam en est très loin. Je pense à ces phrases de Ferdinand Lot citées par Jacques Benoist-Méchin dans sa très belle biographie de Kémal Atatürk :
« L’Islam apporte non seulement une religion, mais un droit, une politique dont on chercherait vainement un équivalent dans l’Évangile. Encore cette façon de parler est-elle inexacte : droits, coutumes, usages même, tout est indiscernable de la religion. Impossible de toucher à quoi que ce soit sans risquer d’offenser le dogme. Et comme droit, politique, usages sont rudimentaires, constitués par une société peu évoluée, c’est une tâche surhumaine d’adapter une société musulmane à la vie moderne. Ici, la religion ne se laisse pas réduire à la portion congrue. Il est vain de chercher à la mettre à sa place, car sa place est partout et nulle part. »
Pour simplifier, je nomme cela les « mœurs musulmanes », sans aucun jugement de valeur.
L’expérience de l’évolution des religions dans des sociétés développées montre que si, au sein de la majorité de la population, les croyances et pratiques religieuses ont tendance à décliner à un rythme variable selon les différents contextes, les mœurs issues de ces religions restent prégnantes pendant beaucoup plus longtemps.
La question purulente de l’islamisme fait perdre de vue l’importance des « mœurs musulmanes » en ce qui concerne (i) la compatibilité du mode de vie des personnes baignant dans ces mœurs avec celui de la population des pays d’accueil (ici, européens), (ii) leur intégration et (iii) leur assimilation, ces 3 étapes ayant été de tout temps, avec diverses variantes, l’histoire des individus venant s’établir dans un autre pays, en tout cas en France, faute de quoi il faut parler d’invasion. Précisément, cet aspect culturel et non directement religieux constitue un enjeu majeur :
– déjà, les populations musulmanes ou d’origine musulmane proviennent de pays dont aucun n’a connu de longue tradition d’autonomie de la société civile par rapport aux religions, équivalent de la construction de la laïcité en France :
. on peut citer avec raison certaines (hélas, rares) avancées dans cette direction que vous évoquez, à savoir les politiques d’Habib Bourguiba en Tunisie et, surtout, l’effort prométhéen d’Atatürk pour arracher son peuple à l’arriération ;
. mais on est loin du contexte créé parfois depuis deux siècles par la révolution industrielle en Europe, depuis la 1ère moitié du XIXe siècle dans l’ouest et une partie du centre de notre continent : sauf exception, les populations musulmanes ont grandi dans des pays ayant à peine connu le commencement de cette évolution, ce qui ne suffit pas à donner des repères culturels d’une société développée ; et, même s’il existe un certain nombre de personnes remarquablement intégrées, la présence dans les pays européens développés depuis en moyenne 2 générations ne suffit pas à rattraper complètement ce retard chez beaucoup de musulmans dont l’univers mental reste formaté par l’islam.
– surtout, le poids des mœurs musulmanes reste très lourd chez la majorité des musulmans et elles constituent de multiples freins à l’intégration, voire à la compatibilité, comme le montrent les quelques exemples suivants :
. refus de consommer certains aliments (porc, alcool, …) pour des raisons de principe (ce qui n’est pas la même chose que, par exemple, de ne pas boire d’alcool pour des raisons INDIVIDUELLES = il y a partout des gens qui n’aiment pas ou ne supportent pas l’alcool) même pour des individus qui ne sont pas (vraiment) croyants ; résultat pratique : il est compliqué d’inviter ces personnes à partager un repas, alors que cela constitue traditionnellement en France un mode important de sociabilité (« Viens dîner à la maison demain ») et, au-delà, d’intégration ;
. pratique du jeune du ramadan (29 à 30 jours en continu) qui a pour effet de perturber le fonctionnement des entités au sein desquelles ces personnes travaillent, ce qui revient à imposer à tout le monde les conséquences de leurs croyances ou coutumes ; dans certains cas, ce comportement devrait relever de la faute lourde : ainsi, en pratiquant le ramadan, un footballeur de haut niveau dont le contrat et la rémunération coûtent très cher à leur club, se met en situation de ne pas pouvoir jouer – c’est-à-dire faire son métier – correctement car l’organisme d’un sportif de haut niveau est une « mécanique » très délicate qu’un tel régime alimentaire aberrant et prolongé ne peut que gravement perturber ;
– plus grave, ces mœurs musulmanes nuisent d’abord aux femmes, que ce soit en raison du peu de considération de l’islam pour elles (ce n’était pas beaucoup mieux au sein de maintes religions chrétiennes : mais, sauf exception, cela relève du passé depuis des décennies au moins en France et dans les pays européens développés) ; apparemment superficielle, la question des coutumes vestimentaires constitue une oppression quotidienne à laquelle il est souvent difficile d’échapper ;
– plus grave encore, cela constitue fréquemment un frein à l’exogamie, c’est-à-dire aux mariages en-dehors de la « communauté », soit parce que, par principe, un musulman ne veut pas épouser une personne qui ne soit pas musulmane, soit parce que, s’il accepte le principe d’une telle union, des conditions fréquemment insupportables pour les non musulmans sont imposées, allant de l’obligation de respecter de multiples coutumes contraignantes à celle de se convertir à l’islam.
Combien de musulmans peu ou pas croyants ont-ils le courage de rejeter ces mœurs musulmanes (ex : « Non, je ne fais pas ramadan ») alors qu’ils sont constamment sous la pression des injonctions – entretenues par un système d’espionnage et de dénonciations – des parents, des « grands frères », des camarades de classe, etc. ?
Qui plus est, le nombre de musulmans constitue un frein cumulatif : dans un certain nombre d’endroits, notamment des banlieues, qu’ils le veuillent ou non, les musulmans vivent essentiellement « dans la communauté », l’école étant parfois la seule chance d’échapper à ce pesant univers.
Il faudra facilement encore 2 générations pour que l’influence de l’islam décline significativement dans une partie appréciable des musulmans. Et il faut compter plusieurs générations supplémentaires pour que l’influence des mœurs musulmanes soit érodée au point que les personnes « d’origine musulmanes » puissent choisir en toute liberté – en n’y pensant même pas – de ne pas respecter ces mœurs musulmanes. C’est beaucoup trop long.
Instinctivement, les Français – dont un grand nombre sait que notre pays a su intégrer de très nombreux immigrés d’origines variées et qui font partie de leurs ancêtres – ressentent cela et supportent de moins en moins cette « exception musulmane » régulièrement assortie de propos injurieux sur « la France raciste », ce qui explique la montée en puissance du RN en France. Ce phénomène survient, parfois depuis vingt ans, dans maints pays d’Europe de l’ouest, y compris au Danemark et en Suède dont la population a longtemps eu une vision naïve et moralisatrice de ces questions d’immigration et d’intégration, allant jusqu’à jouer les donneurs de leçons vis-à-vis de la France. Hurler à la « (re)montée du fascisme », c’est refuser de réfléchir sérieusement et de reconnaître l’existence d’un très sérieux problème pour lequel il n’existe pas de solution évidente, surtout dans des pays démographiquement sinistrés. Seul un débat ouvert et honnête peut permettre d’identifier une « combinaison de pistes » pouvant résoudre certaines questions.
Ce que vous dites existe. Le contraire aussi. Ca dépend des comportements familiaux, du quartier, de l’école. Bref il y a des individus très différents les uns des autres. D’autre part le fait que l’assimilation prenne plusieurs générations a été vrai dans la plupart des pays d’accueil, non seulement en France (je me souviens de ce qu’on disait dans ma jeunesse des Polonais de Lorraine « inassimilables ») mais notamment aux États-Unis : l’immigration européenne du XIXe siècle a donné des gangs nationaux et généré des mouvements xénophobes
En attendant, la police et la justice doivent faire leur travail, et cessées d’être entravées par des associations qui ont dérivé du charitable vers « la culture de l’excuse ».
Ce que dit Liger est intéressant. Toutefois, en ce qui concerne le refus de manger du porc, boire de l’alcool et faire le ramadam, je ne vois pas en quoi cela pose problème. En tous cas un problème plus gênant que lorsque je dis à un végétarien, ou à un alcoolique, « Viens dîner à la maison demain ». Dans certaines régions, la tradition… fait que les champignons, les tourterelles, les palombes… perturbent le train-train des entreprises pendant un mois. Sans parler de nos sacro-saintes fêtes de fin d’année, puisqu’elles sont l’occasion de faire tourner le Commerce.
Bien d’accord ! Faire le ramadan est une option personnelle sans grandes conséquences. Ce serait l’imposer à d’autres qui serait grave
il ne faut pas assimiler l ‘islamisme et le radicalisme djihadiste . Le terme islamisme est un neologisme forgé par les intellos occidentaux . il faut parler d ‘islamisme comme les pays musulmans ou il y a des croyants en l ‘islam , tout simplement . Par exemple au Maroc , le parti au pouvoir est un parti islamiste modéré , et pas du tout un parti islamiste radical.
D’accord. Comme dit des islamistes sont des parties politiques, par exemple les frères Musulmans. Par contre, au Maroc, pays que je connais bien, je suis parti. Hicham modéré n’est plus au pouvoir. De toute façon c’est le roi qui gouverne.
C ‘est exact : Mohammed 6 gouverne et regne . Un peu comme Hassan 2 , Notre ami le Roi . La Monarchie la bas , c ‘est la sécurité , comme dit le pouvoir . Ca a l ‘air d ‘etre vrai , il y a peu d ‘attentats au Maroc , on se promene dans les banlieues difficiles de Casablanca ( derb sultan) avec moins de crainte que dans le 93 et 94
Oui, en précisant que Mohammed 6 est moins autoritaire que Hassan 2, plus libéral pour le statut de la femme, et plus éloigné de la gestion au jour le jour, ce qui illustré par les ragots sur ses voyages en France